Dans un marché saturé (cotisations en hausse de 0,5 % entre 2022 et 2021) et quand le pouvoir d’achat, principal moteur de la croissance économique depuis plusieurs années, stagne durablement, l’ajustement par la concurrence devient plus prégnant. D’un côté, l’assuré, particulier ou entreprise, cherche à maîtriser son budget assurance entre les assurances obligatoires et les autres ; de l’autre, face à un contexte socio-économique incertain, les assureurs1 font alors feu de tout bois pour se développer via la distribution multi canal : ils low-costent les garanties, mensualisent les cotisations et promotionnent des mois gratuits à tout-va pour leurs nouveaux clients…

L’hyper concurrence assurantielle

L’exacerbation de la concurrence par les pouvoirs publics est facilitée par le nombre élevé d’acteurs opérant sur le marché. La France, pays du fromage est également, sans doute, la championne du monde de l’assurance en égard au nombre d’assureurs et d’intermédiaires qui opèrent sur le marché national.

En 2022, 588 organismes d’assurance sont agréés en France pour un encaissement de 240 Md€. L'Orias, Organisme pour le registre unique des intermédiaires en assurance, banque et finance, a dénombré 71.163 intermédiaires inscrits dans 119.777 catégories d'inscriptions au 31 décembre 2022.

Cela peut expliquer le soin attentif qu’apportent régulièrement les pouvoirs publics de surveiller, entre autres spécificités françaises, l’évolution des tarifs de l’assurance de masse, à l’instar de l’évolution du prix du lait au détail ou de la baguette ! Dans ce contexte ouvert, l’assurable français bénéficie d’une faculté que le monde entier devrait nous envier, à savoir, la possibilité de choisir parmi un foisonnement de solutions et de fournisseurs traditionnels et digitaux.

Oui ! La France assure et bancassure2 à tout-va, et pour longtemps encore, malgré le mouvement de concentration qui s’est opéré dans le monde mutualiste et dans l’assurance européenne depuis une dizaine d’années. NB. Le nombre de mutuelles santé a été divisé par cinq depuis 2001 et celui des institutions de prévoyance par deux (Rapport 2022 de la DREES).

L’assurance s’incruste partout dans notre quotidien, à l’instar des garanties affinitaires… Et pourtant à y regarder de près, les Gaulois que nous sommes ne sont pas toujours en état de faire jouer à fond la concurrence que les pouvoirs publics prétendent promouvoir pour son bien-être et son portefeuille !

La fidélité relative des assurés à leur assureur

En effet, les assurés sont, aujourd’hui, majoritairement attachés à leur assureur. En effet, 78 % d’entre eux disent accorder leur confiance à leur assureur principal et se déclarent prêts à le recommander. Cette confiance se traduit concrètement par la durée de souscription auprès d’une même compagnie, puisque plus de la moitié des Français explique détenir son contrat automobile et son contrat habitation chez son assureur principal depuis plus de dix ans – 52 % pour le premier, et 51 % pour le second3.

Cette fidélité s’explique en grande partie par la reconduction tacite des contrats et la mensualisation des cotisations. Il en serait tout autre si les contrats d’assurance non-vie avaient une durée ferme, d’un an, comme au Royaume-Uni, par exemple.

Contrairement aux idées reçues, les conditions principales de cette fidélité ne seraient ni le prix ni la satisfaction globale par rapport à l’offre. En effet, pour la majorité des Français une excellente gestion des sinistres est la condition première de leur fidélité (Source: Synaxia conseil).

Néanmoins, les assureurs ne doivent pas dormir sur leurs deux oreilles, sachant que 58 % des Français ont le sentiment que les assureurs sont facilement interchangeables et qu’ils ne proposent plus que des offres similaires au détriment d'offres personnalisées (Source : L’argus de l’assurance). Sentiment, sans doute, conforté par l’uniformité et la standardisation des sites en ligne des assureurs et le recours généralisé au digital…

Notes

1 La France compte près de 600 organismes s’assurance agrées, issus de trois familles (sociétés de capitaux, mutuelles et Instituts de prévoyance).
2 Parts de marché de la bancassurance en 2022 : 15,9 % en assurance automobile et 26,9 % en assurance de biens (Source : France Assureurs).
3 Cf. la première édition du baromètre « Les Français et leur assureur » du cabinet Deloitte - octobre 2019.