Projet d’exploitation minière d’une concession aurifère en Guyane française, la Montagne d’Or a fait couler beaucoup d’encre depuis ses débuts. Comment a-t-elle commencé ?
L’orpaillage en Guyane française
Territoire français en Amérique latine, la Guyane est connue pour ses ressources minières qui attirent les orpailleurs de tout bord. Cet or provient des cours d’eau, dit or alluvionnaire, ou directement de la roche. Sa recherche a commencé au XIXème siècle, mais elle ne prend énormément d’ampleur qu’à partir des années 1990.
En 1975, le Bureau de recherches géologiques et minières, un établissement public français, lance pour le compte du ministère de l’Industrie un inventaire minier de toute la Guyane, qui se centre ensuite sur l’or. Ça lui prend 20 ans, mais de nombreux gisements espérés importants sont découverts. Dont un filon sur la commune de Saint-Laurent-du-Maroni, qui deviendra la Montagne d’Or.
En 1994, la toute nouvelle entreprise française Guyanor se lie avec la SOTRAPMAG (Société de travaux publics et mines aurifères en Guyane), alors propriétaire de 8 concessions sur le site Paul-Isnard. En tout, 150 km2 de concessions minières. L’exploitation est essentiellement alluvionnaire et ne fait aucun profit.
Guyanor ne désespère pas et lance des explorations, sur un financement de la société américaine ASARCO Inc. À la suite de plusieurs forages, un potentiel gisement important est identifié. Guyanor, alors devenu EURO Ressources à la suite d’un rachat de ses parts, demande en 2008 le renouvellement de son PER (Permis Exclusif de Recherche) et approfondit ses recherches d’or dans la terre, et non plus dans les rivières.
L’arrivée des compagnies étrangères
En 2009, EURO Ressources conclut un accord à l’amiable avec la Golden Star Resources, suite à un litige sur la propriété du site Paul Isnard : le PER est transféré à une tierce partie, la SA Auplata. Cette dernière signe en 2010 un accord de coentreprise avec Columbus Gold, société canadienne d’exploration et de développement aurifère. Trois ans plus tard, Colombus Gold rachète complètement les parts de la concession Montagne d’Or et commence à collaborer avec NordGold, société russe spécialisée dans l’extraction d’or.
SOTRAPMAG, qui a toujours fait partie du pays en exploitant et explorant le site pour l’un ou l’autre des acteurs impliqués dans ces concessions, devient en 2013 une filiale de Columbus Gold. En 2014, elle prend le nom de Compagnie minière Montagne d’Or et reçoit les PER pour la zone de la Montagne d’Or et celles adjacentes, afin de déterminer jusqu’où s’étend le filon. NordGold devient actionnaire majoritaire de cette compagnie, avant de devoir revendre ses parts à Columbus Gold suite à l’invasion russe de l’Ukraine et des sanctions américaines en découlant.
Le potentiel du site dévoilé
Avant même le rachat total en 2013, Columbus Gold avait démarré plusieurs forages et déclaré que le potentiel du site Paul Isnard avait été sous-estimé, particulièrement sur la concession Montagne d’Or. Les attentes sont donc importantes, et confirmées par une évaluation économique préliminaire en 2015 qui établit que Montagne d’Or pourrait être la plus grande mine d’or de Guyane.
Alors ministre de l’ Économie, Emmanuel Macron déclare que le gouvernement va “tout faire pour qu’un projet de cette envergure voit le jour”. Sa collègue ministre de l’Environnement, Ségolène Royal, tempère ses ardeurs, estimant que ses propos n'engagent que lui et que les promesses du site et ses impacts sur la nature doivent être soigneusement étudiées.
Les caractéristiques de Montagne d’Or
La zone du projet est classée 2, c’est-à-dire que sa prospection se fait sous contraintes du fait de la sensibilité du milieu. De plus, le site est SEVESO (produisant ou stockant des substances dangereuses pour l’environnement ou l’être humain) depuis 2012, du fait de la présence de cyanure. À cela s’ajoute qu’il est situé entre les deux parties de la Réserve biologique intégrale Lucifer Dékou Dékou, zone naturelle d’intérêt écologique, faunistique et floristique.
Dès lors, la bataille est lancée : entre la compagnie Montagne d’Or, désireuse d’exploiter au maximum, et les associations locales et environnementales, soucieuses de protéger au mieux la biodiversité guyanaise, une des dernières encore intactes en Europe et protectrice de nombreuses espèces endémiques et rares. Au milieu : le gouvernement français, incertain sur ses volontés. Quelles en sont les suites ?
Seule une partie de l’or extrait est utilisée dans l’industrie : 53 % part dans la bijouterie et 40 % dans les banques. Soit 7 % pour l’industrie et l’électronique.