Outre le fait d’étendre la résiliation par l’assuré à tout moment pour les contrats souscrits hors ligne, il existerait la possibilité de réduire la durée des contrats ; à six mois par exemple en non-vie. Si cela est aisé en assurance dommage, c’est une autre paire de manches pour l’assurance en cas de vie, liée à la durée de la vie humaine et dont les retraits sont aujourd’hui fiscalement encadrés pendant 8 ans ; et 8 ans, c’est très long dans le contexte court-termiste actuel ! Parole d’actuaire. À moins de réduire notablement les sanctions fiscales en cas de sortie avant terme ou de permettre le transfert sans pénalisation vers un assureur mieux-disant ou sur un autre contrat plus généreux du catalogue du même assureur !

Que penser alors de l’idée émise de porter le délai de rétention des contrats vie de 8 ans à 10 ans ou 12 ans, voire plus pour bénéficier d’un régime fiscal plus favorable1? Certains n’y verraient-ils pas une raison supplémentaire de décollecte alors que les économistes voient dans l’assurance-vie le poumon de l’économie nationale ? Dans ce contexte évolutif, n'omettons pas de mettre également en exergue l’impossibilité pour l’adhérent d’un contrat groupe ou d’entreprise de changer d’assureur et de contrat, certes abondé en partie ou en totalité par l’employeur.

Autres innovations assurantielles…

Pouvoir changer d’assureur à tout moment de l’année, sans perte de cotisation et d’avantages fiscaux permettrait plus facilement aux particuliers et aux entreprises de faire jouer davantage la concurrence nationale et internationale. On pourrait également innover en associant étroitement la couverture d’un risque à son usage plutôt qu’à sa possession. Il pourrait en être ainsi de l’assurance automobile obligatoire incluse dans le prix du litre d’essence, du gasoil ou du KW ! Faire le plein d’assurance à la pompe ou au chargeur de batterie, l’assurance auto pay as you use… Il pourrait en être ainsi également d’une épargne dont le rendement ne serait plus fonction de l’ancienneté du contrat chez un assureur, mais lié à la durée de placement du capital investi… Au vu des innovations préconisées, il apparaît clairement que la volonté des pouvoirs publics est de promouvoir le changement d’assureur pour tenter de compenser les hausses tarifaires. D’autant plus, Cette politique ne peut se limiter au domaine non-vie pour être efficiente et crédible2. Elle devrait être étendue aux contrats d’assurance-vie dont l’encaissement représente près des 4/5 des cotisations annuelles des assureurs. Gageons qu’une telle avancée concurrentielle ne serait pas de nature à remettre en cause la primauté incontestée de la France en matière de fromage et d’assurance !

Le spectre de l’inassurabilité des risques systémiques

Cela dit, l’évolution des tarifs trouve sa limite face au spectre de l’inassurabilité des risques systémiques « climat, cyber, pandémie ». Se pose ainsi la question de leur mutualisation solvable. Sera-t-il possible d’anticiper et de réduire notre exposition à des événements dont le dimensionnement et la récurrence ne cessent d’augmenter dans le temps : dérèglement climatique, cyberattaques, tensions géopolitiques ?

De fait, en 2023, les professionnels de l’assurance ont placé le cyber risque en tête des menaces, en matière de probabilité d'occurrence et d’impact à moyen terme, suivi par le dérèglement climatique et l’environnement économique dégradé3/sup>.

Dès aujourd’hui, l’inassurabilité de certains risques est devenue réalité, à l’instar de l’État de Californie, devenu inassurable, suite aux inondations et aux incendies, survenus au cours de l’été 2023. En France, les questions d'assurance suscitent des inquiétudes dans les communes, au terme d'une année marquée par des sinistres climatiques à répétition et les émeutes urbaines du début de l'été. Dans ce contexte, les cotisations et les franchises ont explosé. Faudra-t-il, alors, remettre en question les pouvoirs de résiliation contractuels des assureurs ? À suivre…

Notes

1 Cf. le rapport Gallois (202). La proposition 18 recommande que la durée de détention des contrats soit allongée au-delà des 8 ans actuels, pour être exonéré des intérêts perçus.
2 Selon Efficy et Eloquant, deux spécialistes de la relation client dans le secteur des assurances et mutuelles, une étude menée par OpinionWay en octobre 2023, révèle à l’heure où la résiliation en trois clics facilite le changement d’assurance, que plus d’un Français sur cinq serait prêt à se séparer de son assureur en raison d’un manque de relationnel.
3 La vulnérabilité au cyber risque monte au deuxième rang des préoccupations des experts, derrière le risque climatique, et devant le risque géopolitique. Cf. la cartographie prospective des risques, réalisée par la fédération professionnelle France Assureurs et « Future Risks Report 2023 », réalisé par AXA, Ipsos et Eurasia groupe.