De tous temps, le genre poétique a eu droit de cité. En Arabie, les poètes rassemblaient les acheteurs dans les souks pour leur entonner quelques vers de leur cru et animer les échanges. La poésie y reste une coutume dont les arabes ne sont pas peu fiers. Dans nombre de contrées, elle sert les ardeurs des amoureux pour conquérir leur promise. Et de grands hommes et écrivains continuent à la pratiquer et à la dédier à la postérité.
Quel genre est-elle au XXIème siècle ?
Au XXIème siècle, le genre poétique est un héritage que certains amateurs ou poètes aiment revivifier. Cependant, les médias qui ont remplacé les canaux de communication primitifs par des canaux médiatiques et autres lui donnent moins de visibilité. Les éditeurs mêmes répugnent à investir leur temps et leur argent à publier des recueils dont le lectorat manquerait à l’appel. D’après une information publiée sur Radiofrance au sujet de la poésie, la poésie, et en particulier la poésie contemporaine représente une part minuscule du marché du livre. Les gros succès de vente sont des recueils de classiques (Alcools d’Apollinaire) ou des rares poètes contemporains qui soient populaires ou un peu étudiés à l’école (Yves Bonnefoy).
Au XXIème siècle, on s’interroge sur l’utilité de la poésie. Celle-ci est sans doute devenue aussi désuète qu’une coutume que l’on a délaissée avec le temps, que les perruques de Louis XIV ou les armes de guerre des vikings. Pourtant, on la pratique compulsivement et dans certaines cultures, comme la culture espagnole, on la chérit et elle nous accompagne au quotidien.
La poésie moderne est aussi dépréciée pour ses allures transgressives des normes, ses libertés audacieuses sans conformité avec les canons poétiques jusque-là admis. Cette disposition à fuir les normes et compétences scripturales a pris ses sources dans la révolte surréaliste et en est la continuité.
On écrit en marge de l’espace publique, mais on est aussi un marginal quand on est poète au XXIème siècle.
Une poésie du XXI ème siècle aussi effective qu’inédite
Elle a des tendances méconnues du public, mais continue à muter, à défendre ses droits. Au regard de son héritage du passé, certains intellectuels rejettent les poètes qui prennent des libertés dans leur pratique. Des poètes comme Philippe Jaccottet ou encore François Jacqmin se montrent très vigilants à l’égard des facilités d’écriture, des tics de langage, de tout ce qui menace constamment la parole poétique de n’être pas pleinement authentique, nous apprend Gabriel Grossi, passionné de littérature et de poésie pratiquant l’écriture poétique depuis l’enfance.
Pourtant, il existe un phénomène nouveau qui trouve ses marques dans la continuité du mouvement surréaliste. Ce phénomène se traduit par le fait de briser les codes du langage. À notre époque moderne, la première ébauche de cette disposition à briser les codes du langage avec l’apparition du surréalisme se manifeste par ce qui est connu sous le nom de rap et de slam.
Ces particularités s’accompagnent d’une forme d’engagement de la part des poètes prêchant le réel, une variété de styles et de formes - le poème en verset voit le jour, les poètes d’autres contrées nous sont plus accessibles, etc -, mais aussi un recours à d’autres arts comme la peinture et la sculpture.
Pour conclure, la poésie française contemporaine est riche d’une belle diversité de poètes. Cela la rend certes difficile à circonscrire. Mais c’est en cela qu’elle montre qu’elle est bien vivante, pour reprendre les propos de Gabriel Grossi.
Comment réinvestir la poésie au XXIème siècle ?
Peu lue, la poésie survit au désintérêt du public en optant pour un registre de littérature qui privilégie la scène. On la porte à la connaissance du public en l’oralisant. C’est une façon d’élargir son lectorat et susciter de l’intérêt pour peu que les sujets soient du goût des auditeurs.
La poésie représente peu de chose sur le plan économique, selon le syndicat national du livre (SNE). Or, au regard du roman ou du cinéma, sa visibilité est minime. Au 25e Printemps des poètes, un élu de Cholet estimait que la poésie méritait plus de visibilité. D’autres soutiennent cette thèse.
À l’échelle mondiale, chacun en prend conscience. C’est dans la perspective de mettre un coup de projecteur sur l’écriture poétique qu’un site allemand Lyrikline a été fondé en 1999. Il met l’accent sur le côté sonore en oralisant le texte poétique, suscitant ainsi plus de curiosité chez le public.
La poésie n’est pas une maladie honteuse, soutenait Jean-Michel Maulpoix. Les poètes peinent à s’assumer. Ils ont un titre qu’ils jugent plus honorable et pratiquent la poésie de façon optionnelle. C’est un autre facteur de vulnérabilité pour la pérennité de la poésie. Pourtant, la poésie ne se vend pas aussi mal que la littérature en général. Ce sont eux qui pulsent la poésie dans l’Histoire et le temps, c’est entre leur mains et sous leur plume que la poésie réalise ses exploits.