Parfois les images valent plus que les démonstrations.
Place Saint-Pierre, samedi 25 septembre 2021. Dans quelques jours, le Vatican rétablira ses frontières. Tout qui est dépourvu de greenpass, pass vert, passe sanitaire1 se verra interdire l’accès de l’État pontifical. Non, ce n’est pas une fiction. Qui eut pu l’imaginer ? C’est la stricte vérité.
Selon la doctrine de l’Eglise, l’interdiction de discriminer vaut pour tous les êtres humains, comme le Pape Francois Ier l’a encore récemment rappelé concernant les immigrés qui passent les frontières des États Occidentaux2. Dans quelques jours, cette interdiction de toute discrimination ne s’appliquera plus, sur le propre territoire du Vatican, aux personnes dépourvues de greenpass.
N’y entreront plus que ces chrétiens, et non chrétiens, pour autant qu’ils soient adeptes du greenpass, qualifié de surcroit d’instrument destiné à retourner à la “normalité”. Et de fait, il s’agit d’un instrument produit de la société de consommation.
Un instrument généralement adopté non par démarche citoyenne mais pour motif de consumérisme, en échange du droit de prendre l’avion, d’entrer au stade, à la piscine, d’accompagner des amis au cinéma et au théâtre, ou plus dramatiquement par contrainte, serait-ce pour “avoir le droit” d’exercer sa profession, d’ “avoir le droit” de rendre visite à un proche dans une maison de repos.
Toutes causes à des années-lumière de tout motif sanitaire auquel cet instrument ne répond en rien. Trop nombreux sont encore ceux qui sont victimes de sa propagande, motif pour lequel il faut ici encore rappeler que le greenpass n’empêche ni de contaminer ni d’être contaminé par le COVID.
Quant aux chrétiens et non chrétiens les plus riches (Américains et Chinois voyageurs pour la plupart), ils peuvent se permettre de se payer, toutes les 48 heures, les “tests d’accès” au plus grand bénéfice des actionnistes des sociétés concernées. Autres grands bénéficiaires de cette affaire3, les sociétés informatiques, et ceux qui accaparent, à des fins qu’il reste à démasquer4, les données qu’elles récoltent.
À peine un quart de la population mondiale se trouve dans les conditions d’obtenir un greenpass, en résumé l’Union Européenne, l’Amérique du Nord et la Chine. Les plus pauvres, qui ne peuvent se payer le luxe de tests à répétition, tantôt futiles, tantôt onéreux, rarement utiles et, dans tous les cas cause directe et incontestable de discrimination, resteront à la porte du Vatican, sauf à devenir adepte du green pass. Sic, comme annoncé, à partir du 1er octobre 2021 … un pas de plus vers l’effondrement de la civilisation démocratique née il y a plus de deux millénaires sur le continent européen et refondée sur des racines chrétiennes quelques siècles plus tard.
La doctrine aurait cédé devant le business ? Business allié à de puissants “milieux conservateurs”, mieux qualifiés en Italie poteri forti ? Pouvoirs qui auraient à présent entrepris cette escalade du Vatican, non sans espérer démission anticipée de l’actuel chef de l’Église5 ? Réponses à ces questions pourraient en dire long sur l’avenir de la chrétienté, outre de nos démocraties occidentales.
Le petit garçon de 10 ans qui “s’est pris le virus” par greenpass interposé à l’école, et accompagne ses parents en week-end à Rome, on ne va pas le laisser seul dans sa chambre d’hôtel et lui faire manquer la visite du Vatican ?
Ce n’est donc pas pour empêcher ce virus, qui tient la citoyenneté en échec, de passer les portes du plus petit État au monde qui est aussi un des plus puissants de la planète, que cette interdiction d’accès sans greenpass a été prononcée. Dans les queues qui serpentent pour entrer dans la Basilique Saint-Pierre, on tousse à qui mieux mieux. Dans quelques jours, le greenpass n’empêchera pas le virus de passer ses portes. Pour lui, l’accès reste libre, libre aussi sa circulation passe-murailles.
L’interdiction d’accès sans passe ne protège personne, ni à l’intérieur ni à l’extérieur des murailles. Car après avoir joué à saute-mouton dans les queues de la Basilique et des Musées du Vatican, ce petit virus s’apprête à prendre l’avion. On le retrouvera bientôt à Buenos Aires, à Washington, à Delhi, à Tokyo et à Pékin, et encore à Bruxelles en compagnie des fonctionnaires européens. Effet greenpass garanti, cheval de Troie dans cette pandémie.
Pendant ce temps, les habitants en Italie comptent les morts, qui curieusement restent trop nombreux au regard des statistiques de contagions. Le nombre de cycles d’analyse producteurs des résultats des tests6 aurait-il chuté pour que le virus ne se laisse plus voir comme il le faisait lorsque la politique avait choisi d’enfermer l’ensemble de la population quitte à frapper l’économie ? À présent, les écoles ne ferment plus pour quelques cas positifs. Seuls les compagnons de classe sont renvoyés à la maison. Du “bon usage” des statistiques en politique, pour gouverner selon l'air du temps”, et les intérêts qui s’y rattachent.
C’est trop compliqué de supprimer greenpass et fermetures généralisées, et de remplacer leurs couts exorbitants par des moyens de prévention raisonnables et efficaces, tels le masque et le mesurage de la température à l’entrée des locaux fermés ? Trop compliqué de prendre ces mesures sélectives et efficaces de précaution qui, à faible cout pour le citoyen et la société, imposent la permanence à la maison à ceux qui toussent et présentent des symptômes répertoriés ?
Des mesures sanitaires effectives et efficaces devraient permettre aux budgets privés de reprendre vigueur au rythme de l’économie et les budgets publics d’épargner ces sommes colossales en matériel de surveillance électronique et autre personnels de fonctionnement pour les transférer vers les secteurs d’utilité publique (transports en commun, environnement, etc…) qui restent en carence.
La reprise immédiate de l’économie et de la démocratie devrait récompenser immédiatement citoyens et sociétés. Certes, il sera déjà plus difficile de lutter contre la pauvreté, afin que ce virus ne puisse profiter du manque de chauffage pendant l’hiver pour se diffuser. En tout état de cause, c’est indispensable, non tant pour le bien etre de la population que pour éviter l’explosion des contagions.
Quant à ceux qui préfèrent tracer leurs employés, fût-ce au risque de détruire leur santé, ils n’y trouveront pas leur compte. Reste à savoir quels sont les véritables intérêts qu’ils servent, et ce qu’ils cherchent à obtenir.
En attendant, la chrétienté, racine de nos démocraties, semble ne pas s’apercevoir combien cette interdiction discriminatoire d’accès au Vatican, cette image que chaque jour des milliers de pèlerins et visiteurs rapporteront chez eux à travers le monde, la fait trembler sur ses fondements. Rien n’attaque avec plus d’efficacité une institution qu’une agression des valeurs sur lesquelles elle repose.
Ce samedi matin, la Place Saint-Pierre resplendit dans un premier soleil d’automne. Sur la Place, toutes les boutiques de souvenirs ont levé leurs battants. Reste un article aux abonnés absents: l’Osservatore Romano.
Ce quotidien du Vatican communique la doctrine de l’Église. Aujourd’hui il transmet donc cette ouverture au monde que le Pape François Ier veut donner à la chrétienté, ses priorités, et les difficultés qu’il rencontre à chasser les marchands du temple. Rien ne sert toutefois de discourir, si on ne dispose pas de moyens pour communiquer7. Aujourd’hui pire encore, lorsque l’image que l’on donne déclare le contraire de ce que l’on professe.
Sur la Place Saint-Pierre, le virus circule en liberté, les statuettes souvenir aussi, mais la pensée de l’Église n’y trouve plus sa place. Aucune trace de l’Osservatore Romano sur le territoire du Vatican. Il a fallu dépister le journal jusque dans les locaux de son éditeur (où l’accueil fut des plus courtois).
Quelqu’un y savait-il que le journal qui diffuse la pensée de l’Église d’aujourd’hui, celle que le Pape s’efforce de maintenir dans le respect des valeurs d’une civilisation millénaire, le samedi des 9.00 heures du matin, ont déjà disparu de la Place ? Sur la place Saint-Pierre, les objets circulent. À partir de ce 1er octobre 2021, ils l’occuperont exclusivement avec les seuls adeptes du greenpass8…
Trois quarts de l’humanité, en Europe, Amérique du Nord et Chine, ne passera plus les portes du Vatican … peu importe que ce soient les citoyens du monde les plus pauvres9 qui devront s’en passer 10. La doctrine serait-elle occupée à “s’aligner” sur une non-discrimination à géométrie variable selon les intérêts en cause ? Serait-ce pour ce motif que la pensée a quitté la place ? Qui sait si la coopération au développement de l’Occident se sera pas aussi dorénavant, conditionnée à cette soumission au greenpass. Pour mieux régner.
Poursuivant la promenade vers l’auditorium de la Consiliation ce samedi de septembre, on ne pouvait manquer “les jeunes protagonistes de la Reprise”. À la XIeme Assemblée programmatique de la section jeunesse de l’Association Nationale des Communes italiennes (ANCI), lieu de débat et de préparation des politiques futures, … seuls les porteurs de greenpass étaient admis. La programmation politique communale est donc elle aussi, dès aujourd’hui, réservée aux adeptes du greenpass, à l’exclusion des “autres”, ces citoyens respectueux de la Constitution et autres Conventions Internationales, qui n’en pouvaient passer les portes.
Les Constitutions des États démocratiques interdisent la discrimination. L’article 7 de la déclaration universelle des droits de l’Homme (1948) et l’article 14 de la convention européenne des droits de l’Homme entrée en vigueur le 3 septembre 1953 l’interdisent. L’article 21 de la Charte Européenne des droits fondamentaux, proclamée lors du Conseil européen de Nice le 7 décembre 2000, l’interdit.
Dans sa Résolution du 9 juin 2021, le Parlement Européen interdit toute discrimination entre porteurs de certificats liés à la santé et ceux qui en sont dépourvus11, position que le Réglement du Conseil de l’Union Européenne n° 2021/953 a à son tour adopté le 14 juin 2021.
Tous ces textes qui fondent le système démocratique condamnent tout greenpass au titre de violation des droits aliénables des citoyens. Et cependant, ces derniers mois, les États Occidentaux ne cessent de les violer. Et à leur suite, l’Église à son tour est prête à tomber dans le piège, ce 1er octobre 2021, emportant dans sa chute les valeurs chrétiennes qu’elle porte depuis deux millénaires, pierre d’angle de ces textes législatifs.
Le Pape François Ier a raison lorsque dans l’Observatore Romano si bien caché aux yeux du public ce samedi, il appelle “Reconstruire l’Europe, malade de fatigue”12. Malade de fatigue, ou malade de conflits d’intérêts et d’abus de pouvoirs organisés ?
Ils sont certes malades, les Européens prêts à vendre leur prêt pour un plat de lentilles, ou parce qu’ils ont peur. Malades aussi ces Occidentaux qui interdisent à leurs concitoyens le droit d’instruire et de s’instruire, le droit de bénéficier de ces lieux de culture du corps et de l’esprit qui maintiennent individu et société en bonne santé.
Pendant ce temps, des femmes, en Afghanistan, ne plient pas devant les talibans, … pour ne pas renoncer à ce même droit à l’instruction, à la culture qui permet de faire société. Le soleil se lève à l’Est.
Crépuscule de la démocratie, dans une Europe, malade de fatigue … À moins que les dizaines de milliers de manifestants qui ont défilé ce même samedi 25 septembre 2021 à Rome et ailleurs en Europe, en Italie, en France, en Belgique, dans ces États contaminés par le virus du greenpass, ne préludent au retour de l’aube en Occident ?
Références
1 Communiqué de l’Eglise catholique.
2 Contro ogni discriminazione.
3 Attacco hacker, Corte dei conti: Regione Lazio ha limitato danni.
4 Des données de patients belges atterrissent en Russie : "Un danger pour les hôpitaux".
5 Il Papa e le vipere che lo vogliono morto.
6 Plus il faut de cycles d’amplification pour l’identifier, moins le virus est présent dans l'échantillon analysé.
7 Papa Francesco sull’Osservatore Romano e Radio Vaticana: quanti ci ascoltano e leggono?
8 Per la Trattativa condannati solo i mafiosi, assolti Dell’Utri e i carabinieri: ecco perché (in attesa delle motivazioni dell’Appello).
9 Scandalo in Vaticano, speculazioni e denaro sottratto ai poveri.
10 Cinq milliards de doses de vaccin injectées dans le monde : voici les pays en avance, ceux à la traîne.
11 Résolution législative du Parlement européen du 9 juin 2021 sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au certificat vert numérique & 36 & Règlement (UE) 2021/953 du Parlement Européen et du Conseil du 14 juin 2021 relatif au certificat COVID numérique de l’UE.
12 Ricostruire l’Europa malata di stanchezza.