A l’heure du changement climatique où toutes les nations cherchent refuge dans la préservation de leur habitat à savoir sol, air et eau, nous au contraire, peuple africain, sommes amenés à nous battre pour diviser ces mêmes biens, à nous pourtant illégalement répartis par le colonisateur lors de la conférence de Berlin du 15 novembre 1884 au 26 février 1885, conférence qui fixa la modalité du partage de l’Afrique. Peut-être dirions-nous que l’Afrique est tellement vaste qu’il faut la morceler ? Si la question semble fantaisiste, la réalité est plutôt cruelle. En effet, notre continent regorge de beaucoup de conflits mal négociés, mal résolus, conflits qui constituent de véritables bombes à retardement pour les générations à venir.
A cela, s’ajoutent les carences technologiques comme celles qui nous empêchent de patrouiller dans nos propres eaux territoriales, nous poussant par exemple à délivrer des licences de pêches industrielles à des nations très peu soucieuses de l’écologie et de la survie des futures générations. Nos accords signés hier lors de la période coloniale, reviennent comme des boomerangs quand nous constatons que beaucoup de compagnies étrangères payent très peu d’impôts, violent nos droits et polluent nos eaux à cause de l’exploitation des matières premières. Le cas du delta du Niger illustre à merveille nos propos et c’est peut-être dans ces injustices que naissent des associations terroristes aveugles qui ont pour but de prendre aussi leur part du gâteau ?
Les peuples africains sont composés de plusieurs ethnies qui vivent sur plusieurs territoires transfrontaliers et vu le partage fait par le colon, les conflits ne peuvent ne pas manquer sur le continent noir. Cependant, avec les principes du droit international et l’évolution de notre civilisation, plusieurs mécanismes sont mis en place pour surpasser cette dialectique de l’ordre et du désordre, inhérent à toute civilisation sur le point de prendre l’envol du développement.
En effet, les désaccords entre groupes ethniques dans les différents pays sont une cause majeure des conflits sur le continent. La carte politique et la carte ethnique de l'Afrique ne sont pas les mêmes. Par exemple, 84% du groupe ethnique Haoussa vit au Nigeria, 14% au Niger, 2% au Tchad. 65% des Mossi vivent au Burkina Faso, 32% au Ghana. 77% du groupe ethnique des Somaliens vit en Somalie, 12% en Ethiopie et 7% au Kenya [1]. Tous ces groupes ethniques vivent dans des zones différentes, zones qui appartiennent à différents états. Ainsi, les litiges et les conflits territoriaux entre Etats africains sont souvent causés par le fait que les frontières des Etats dans la plupart des cas ne coïncident pas avec les frontières des groupes tribaux et ethniques. Il est important de rappeler que lors de la Conférence de Berlin en 1885, les puissances coloniales avaient réparti l’Afrique en unités territoriales. Les Royaumes, les Etats et les communautés avaient été divisés arbitrairement.
Dans les années 60, les jeunes Etats indépendants ont hérité de ces frontières coloniales avec la ferme volonté de maintenir la stabilité des frontières existantes [2]. Certains scientifiques rappellent ici le principe de l'uti possidetis juris « Vous posséderez ce que vous possédiez déjà » qui est un principe du droit international appliqué aux pays nouvellement indépendants qui suggèrent qu'ils doivent garder leurs frontières précédentes ou de la zone avant l'indépendance. Il a été largement appliqué en Amérique du Sud, en Afrique, en Yougoslavie et après la chute de l'Union soviétique(naissance de nouveaux pays indépendants comme l'Ukraine, la Géorgie, le Kazakhstan).
Malheureusement, le mauvais partage territorial n’est pas la seule source du désordre sur le continent africain. Il faut y ajouter aussi la mauvaise gouvernance et le manque de stratégie pertinente comme levier du développement. Les réalités économiques, les matières premières, l'instabilité politique, l’absence de leadership charismatique et d’institutions libres, conduisent à des conflits entre tribus, groupes ethniques ou nations. Des exemples de tels conflits sur le continent sont légion. La Charte des Nations unies consacre à ce sujet son chapitre VI et propose des solutions telles: la négociation, l'enquête, la médiation, la conciliation, l’arbitrage, le règlement judiciaire, le recours aux organismes ou accords régionaux. Le conseil de sécurité, l'assemblée générale, la Cour internationale de Justice, les organisations internationales [3] et les communautés régionales [4] jouent un grand rôle dans la résolution de ces différends [5].
Références et bibliographie
[1] OGBOYE Latif Ayoola, Le problème juridique des différends territoriaux en Afrique. Thèse de ph.d soutenue en russe à l’université russe de l’amitié des peuples à Moscou en 1993.
[2] Abbas El Abdel Hamid, Pratique de règlement des différends territoriaux en Afrique (aspects juridiques internationaux) résumé de thèse de doctorat, Moscou 1998.
[3] En Septembre 2007, la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) est intervenu pour régler le différend entre deux villages situés le long de la frontière du Bénin et du Burkina Faso. En 2005, le Nigeria a cédé treize villages situés vers la frontière avec le Bénin.
[4] Rapport du Secrétaire général de l'ONU sur la coopération avec les organisations sous régionales A/52/1, Septembre 3, 1997.
[5] Les intérêts de l'Etat et le système universel et régional des droits de l'homme. Chikov P.V, Hadieva G.N Mezyaev A.B , Nasyrova A.M, édité par le docteur en droit, professeur, Kurdyukova G. de Kazan, publié en 2002.