Les politiques migratoires, qu'elles proviennent de la première vague ou de périodes plus récentes, n'ont jamais exigé une assimilation stricte des étrangers.
Quelle forme d'assimilation est attendue aujourd'hui de la part des citoyens français ? Avec l'augmentation des entrées, les politiques ont progressivement assoupli leur vigilance, adoptant des réformes pro-multiculturalistes.
Cela pourrait-il compromettre l'identité culturelle française ?
De quelle manière la France a-t-elle été transformée sous l'influence des défenseurs d’une approche multiculturelle ?
Historique des politiques d’immigration
Après la Seconde Guerre mondiale et jusqu’aux années 70, la France a eu recours à l’immigration pour sa reconstruction économique. Les politiques étaient alors libérales, et l’intégration concernait principalement la main-d’œuvre.
Entre 1970 et 1972, la France a été confrontée à une crise économique, entraînant une réduction des flux migratoires. En 1972, une loi a été adoptée en réponse à cette situation. Le Musée de l’histoire et de l’immigration a consacré un article à cet événement, notant que, face à la montée du chômage, le gouvernement de Jacques Chaban-Delmas a pris des mesures pour l’emploi. Les circulaires Marcellin-Fontanet visaient à diminuer l’entrée de travailleurs étrangers en France.
À partir de 1980, les politiques commencent à s'interroger sur la diversité culturelle. En 1989, ils décident de scolariser tous les enfants, quelles que soient leurs origines. Des mouvements comme “la marche des beurs” en 1983 ont également conduit à des revendications politiques pour l’égalité et la justice.
Dans les années 90, un sens de l'identité nationale émerge, propulsant un mouvement de lutte contre la discrimination.
En 1998, plusieurs lois sont adoptées pour défendre les droits des étrangers, telles que la loi relative à la nationalité qui permet aux enfants nés en France de parents étrangers de demander la nationalité française, et la loi n° 98-349 relative à l’entrée et au séjour des étrangers en France.
En 2006, une loi introduit des tests de langue et de connaissance des valeurs de la République pour les visas long séjour.
En 2010, la question de l’intégration et de l’immigration devient centrale dans les discussions politiques, renforçant les mesures de contrôle.
Plus récemment, des réformes ont permis aux étrangers de dématérialiser leurs démarches administratives et ont simplifié leur intégration.
Évolution des lois
Des politiques d'assimilation moins strictes encouragent une réévaluation des stratégies associées.
La Loi du 9 mai 1975 (Loi sur l'égalité des droits) illustre cette tendance en reconnaissant des droits aux étrangers, y compris le droit au travail. L'assimilation devient ainsi moins restrictive.
La Loi du 11 juillet 1990 (Loi sur la nationalité) a facilité l'accès à la nationalité française pour les enfants d'immigrés nés en France, favorisant une intégration moins axée sur l'assimilation stricte.
Le rapport de la Commission Stasi (2003) a recommandé une approche plus respectueuse de la diversité culturelle, soulignant l'importance de l'intégration plutôt que de l'assimilation. La Loi du 24 juillet 2006 a également reconnu l'importance de la diversité culturelle et la nécessité d'une intégration plus ouverte.
La Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne (2000), bien que non spécifique à la France, a renforcé les droits des immigrants au sein de l'UE, influençant les politiques d'assimilation en France. Patrick Gaïa, professeur de droit constitutionnel à la Faculté de droit et de science politique d'Aix-Marseille, souligne que l’Europe doit évoluer pour devenir “l’Europe des citoyens”, plaçant l'individu au cœur de la réflexion.
La Loi du 7 mars 2016 (Loi sur l'égalité et la citoyenneté) a renforcé ces droits en promouvant l'égalité des chances, mettant l'accent sur l'intégration plutôt que sur l'assimilation.
La Stratégie nationale d'intégration (2018) a soutenu l'importance d'une approche inclusive et respectueuse des diversités culturelles, marquant un pas significatif vers une réévaluation des politiques d'assimilation.
Cependant, Laurent Chalard, docteur en géographie à l’université Sorbonne-Paris IV, souligne que les immigrés ayant réussi leur assimilation, comme les Italiens, les Polonais, les Espagnols ou les Vietnamiens, se sont fondus dans la population française en raison de la raréfaction des flux migratoires récents, coupant ainsi les nouveaux arrivants de l’évolution de leur culture d’origine.
Débats contemporains
Aujourd’hui, l’assimilation se limite principalement à l’adoption des principes fondamentaux de la République : liberté, égalité et fraternité.
La maîtrise de la langue française, indépendamment de la culture d'origine, reste essentielle. Des programmes d’apprentissage du français ont été mis en place, et le Ministère de la Culture indique qu’environ 100 000 personnes viennent chaque année en France pour suivre des cours de français, dont une partie est constituée d’étudiants étrangers. Le label officiel « Qualité français langue étrangère » a été créé en 2007 pour garantir la qualité des enseignements.
L’assimilation prend en compte le respect de l’identité nationale, mais les étrangers peuvent également se définir comme Français tout en conservant des éléments de leur culture. De nombreuses initiatives ont été mises en place pour permettre aux différentes communautés de se rassembler autour d’intérêts communs, tels que le sport, la culture ou les activités associatives.
Les événements culturels, comme les concerts ou les expositions artistiques, jouent un rôle important dans le renforcement des liens sociaux.
Cependant, de nombreux débats sur l’identité engendrent toujours des tensions et des incertitudes quant au sens de la nationalité. Selon un sondage CSA pour CNews, Europe 1 et le JDD, 60 % des Français estiment qu'il faut stopper l’acquisition automatique de la nationalité française pour les enfants nés en France de parents étrangers.
Récemment, des milliers de personnes ont défilé partout en France contre la promulgation de la loi “asile et immigration”, que Jacques Toubon, ancien Défenseur des droits, a critiquée pour avoir introduit ce qu'il appelle une préférence nationale. Ce contexte pourrait remettre en cause de nombreux autres droits pro-migratoires.