C’est une exposition incontournable, à voir sur la Grand Place de Bruxelles jusqu’au 5 janvier 2025.
Elliott Erwin est né le 26 juillet 1928 à Neuilly-sur-Seine, sous le nom d'Elio Romano Ervitz. Derrière les verres épais de ses lunettes, il observe le monde.
Le petit Eliott a passé toute sa jeunesse en Italie. Avant de s’installer aux États-Unis avec ses parents, des immigrés judéo-russes. Les frontières sont bousculées. Le décor est planté.
Durant toute sa vie, Elliott se jouera des conventions. Il étudie la photographie et la réalisation cinématographique au Los Angeles City College et à The New School for Social Research. Il finit ses études en 1950, est engagé comme assistant-photographe dans l’armée américaine, est affecté en Allemagne et voyage à travers l’Europe, qu’il mitraille avec son appareil.
Après l’armée, Elliott Erwin débute comme photographe indépendant. Il travaille pour de célèbres magazines américains tels que Life, Look et Holiday. En 1953, il rejoint l’agence Magnum. Il en aura la présidence durant trois mandats, de 1966 à 1969. Sur ses six cent mille négatifs, l’agence en a conservé plus de six mille.
Mais il a surtout documenté les événements sociopolitiques majeurs de son temps. Comme en 1959, la première visite en Union soviétique, durant la guerre froide, du Président américain Richard Nixon. Ou encore, les funérailles de John F. Kennedy en 1963. Ou plus tard, en 2009, l'investiture du premier Président afro-américain, Barack Obama.
Le photographe et documentariste franco-américain est célèbre pour ses images en noir et blanc qui se moquent de l’ordinaire. Ses sujets de prédilection ? Les femmes, les plages et surtout… les chiens. Qu’il aime particulièrement et pour lesquels il porte un regard plein d’humour. Il publie plusieurs livres, dont Son of bitch, Dog dogs et Woof, qui font la part belle à ses amis les chiens.
Deux cent quinze photos
À ce jour, cette rétrospective de l’artiste est la plus exhaustive. Il s’agit de la dernière exposition conçue avec le photographe, décédé le 29 novembre 2023 à New York.
« La couleur, c’est du domaine professionnel. Ma vie est déjà assez compliquée comme ça. Je m’en tiens au noir et blanc ». Les huit thèmes, Between the sexes, Beaches, Kids, Abstractions, Cities, Dogs, Museum watching et Regarding women, qui regroupent des photos en noir et blanc pour ses projets personnels, ou en couleurs pour les travaux commandés, mettent en avant ses envies et les passions qui ont guidé son génie artistique. Les murs noirs de la galerie, éclairés de faisceaux lumineux projetés tels les rayons du Caravage sur les tirages en argentique, mettent en scène les multiples facettes d’Elliott, qui parvient à voler la magie d’une seconde intime, la puissance fragile et déroutante qui fera l’image phare d’un reportage, et aussi, le regard décalé qui sublimera la publicité d’un produit.
« Dire qu’il y a de l’humanité dans mes photos est le plus grand compliment qu’on ne m’ait jamais adressé ». Sa lentille dérobe, capture et immortalise à jamais les instants fascinants du vingtième siècle, à travers des personnalités telles que le "Che", Charles de Gaulle, Jackie Kennedy ou encore Marilyn Monroe. Sous le prisme de son regard atypique, l’humour se noie dans l’émotion. Les images insolites de la vie quotidienne font ainsi surface, bouleversantes dans leurs mouvements figés.