Vendredi Sain, il doit être 2h du matin lorsque soudain… Je me réveille en sursaut au son d’un assaut!
A moitié somnolant, je ne savais trop ce qui se tramait, entre la réalité présumée ou un doux rêve juste brumé... il me semble, pourtant, qu’une sombre éventualité se résumait.
Hier encore les étoiles étaient fécondes sur le toit d’un paradis coi. Rien ne se laissait entendre à des bornes à la ronde, et voilà que, d’un je ne sais quoi, en cette nuit d’enfer, le ciel s’étiole tel prit d’une sotte d’humeur et gronde : une parade de rafales et de bombes vient parodier l’atmosphère de récits d’épouvante, une hécatombe, … mon cœur s’emballe alors, les bras m’en tombent! Pardi, … que ce passe-t-il dans mon monde?! A peine je me raisonne à résonner cet incident inouï que, soudain, un assourdissant bruit se poursuivit d’un silence net – je me réjouis.
Comme un gros bouton ‘stop’ qu’on appuie, sauf que le top se pause et là j’ouïe la voix d’un jeune orateur, lointaine et alanguie qui aussitôt se fit éloquente et connue; c’était lui – le messie: "Mes frère, mes sœurs. Je suis désolé pour ce qui va suivre; je ne suis ni fou ni ivre, mais il y a un dilemme qu’il faut que je vous livre. Je ne veux pas être seigneur, émir ou empereur, ce n'est pas mon affaire. Je ne veux ni conquérir ni diriger d’hommes - encore moins courir les bêtes de somme. Je ne fais pas de politique, là est justement le hic. Je tâcherai toutefois de faire preuve d’éthique et d’aller droit au sujet dramatique. Je ne voudrais ni vous sermonner ni concéder de serment non-admissible, mais plutôt aider tout le monde dans la mesure du possible; Nous sommes ainsi faits : Nous voulons donner le bonheur à notre prochain, car ce qui compte ce sont les semences de demain. Fini le temps des semonces, nous ne voulons plus haïr, trahir ou défaillir. Nous sommes frères en héritage, tantôt fiers tantôt sauvages, mais toujours liés à l’esprit d’hommes d’équipage. Nous sommes une île riche et qui a tant à offrir, sauf que beaucoup veulent y amerrir et mettre en péril sa culture. Les présages d’une vie meilleure risquent bien de surir, lorsque le naufrager profanera sa propre sépulture. Sachez qu’ici, à l’instar d’une épique aventure, la mer demeure derrière mais l’ennemi, lui, est antérieur et au poil dur. La pierre fine ne perdure, érodée par l’eau impure.
Le mal fait rage, empoisonnant l'esprit des hommes sages. L’île Ô qui devient dès lors emprisonnée de par son propre rivage, s’ancre dans une effusion irraisonnée de malveillance, sang d’encre et de turbulences, là où la vérité est otage de tumultueux mirages. Ce qui est le plus étrange c’est que nul ne s’en dérange. Tôt que tard, sans frein, les symptômes se muent en tare, ternis et rongés dans un coma à éternel refrain… Gisants de vos délits et de mon songe.
Maudit soit à jamais le rêveur inutile, et ses faux soucis existent-en-ciel. Sonnez l’alarme et faisons le tri, au printemps arable l’été est meurtri. Nos aspirations s’amorcent, désarmées entre insatisfaction et abondance. Nous sommes piétinés dans une léthargique danse, et devenons presque inhumains à force de se taire en connivence. « Are we human or are we dancers? » je dénonce! Nous avons besoin d’une révolution salutaire et d’une résolution solidaire, l’air alésé d’antan nous pèse à présent, imposant à la liberté d’être en effraction. Suis-je le seul à être lésé dans cette terre paralysée que cultive la régence de la peur et la détraction ? Une ère où l’intelligence nous rend plus cyniques que critiques, et la culture une arme aux gens frustes et emphatiques. Avis aux frustrés et autres septiques, l’ignorance est devenue remède à l’indifférence.
Il est bien dit que les problèmes lévitent tel le voile sur les sujets que l’on tait ou évite. Nous ne ressentons pas assez et nous pensons beaucoup, mal et vite. Nous devons autrement nous rapprocher les uns des autres, je vous incite à initier le sens de l’unité et du pareil. Rappelez-vous que, si au Royaume des aveugles le borgne jouit d’orgueil, pour l’homme sourd c’est l’œil qui lui sert d’oreille. Ainsi j’espère qu’en ce moment, ma voix parvint à atteindre des millions à travers les rues et les maisons, depuis les hauteurs ou dans les bas-fonds, s’emparer de ces hommes et femmes aux âmes épuisées et esprits errants, leur dire que c’est dans cette condition que nous allons puiser la force de rébellion.
Oui, à tous ces êtres désemparés qui m'entendent: Ne désespérez pas! Les tribulations qui s’abattent sur nous ne sont des attributs passagères d’une meute de lions mal affutés et malhabiles d’amertume et d’appréhension, à l’affût de nous voir nous envoler vers l’évolution. Mais voilà, nous sommes d’une époque où à présent les tribus prennent l’arène des rois et traînent dans le désarroi le pouvoir et ses lois. Oui, loin des fables d’autrefois, le Peuple aujourd’hui n’est plus fou affabulé ou facile proie, il possède la fervente fouge et la foi de reconquérir son droit - que chacun et que chacune d’entre nous le conte sur soi. Ô tant ceci n’est qu’une question de temps et finiront par céder les dictateurs et les détracteurs. Finiront par cesser tous les vices aveuglants, les injustices cinglantes et les sévices sanglants. Ces bourreaux ont beau être des machines créées sans cœur, nous sommes des âmes qui procréent le bonheur.
Mes frères, mes sœurs le temps s’égrène, il est l’heure de prendre le taureau par les rennes et montrer de la dégaine contre ce numéro de triste rengaine. Luttons pour que notre Peine ne devienne couleur Marine, morne et sanguine et qu’elle ne nous ruine. Il y a des quêtes dignes que l’on pèlerine, seulement ne soyons pas les Martyrs des causes anodines. Oui, Ne nous battons pas au nom des choses vilaines mais pour une sérénité pérenne, Ne votons pas pour le chaos mais vers nos idéaux, Ne cédons pas sous les désillusions de la division mais contre le salut de notre mission. Et puis n’attendons pas que l’Histoire le dise, écrivons-en plutôt la devise. Telle est la promesse tenue à notre île exquise".
A cet instant, comme d’un coup de tonnerre, je suis réveillé au ‘pan’ de la télécommande qui tombe par terre. Il est toujours 2h du matin, je m’étais en fait endormi devant la télé sur une séquence du film de Charlie Chaplin, le Dictateur! Cette virée surréelle, qui se révèle lourde de sens, n’aurait été qu’un cauchemar sans conséquence? Et puis j’ai reconnu ma voix, celle de l’orateur aiguisé. J’étais le Messie déguisé ! Mais pourquoi ce lègue ? Pour qui ce monologue? Je crispe un sourire et pousse un long soupire. Demain sera de quelle augure, entre autres questions que je ne peux prédire, je ferme les yeux et sans trêve cède à me rendormir.
Si le Rêve singulier d’une une génération suturée va s’éteindre, la flamme qui (r)anime l’âme révoltée, elle, demeure. Qu’elle soit brève ou incandescente, de ses braises rallumera l’espoir d’une digne relève.