Le monde du rap et des cultures populaires francophones s’est réuni le 11 mai dernier au théâtre du Châtelet, à l’occasion de la première cérémonie des Flammes. Des grands noms de la musique francophone étaient présents, de Aya Nakamura à Orelsan en passant par Tiakola et Damso. Cet évènement est né d’une initiative commune entre Booska P et Yard, deux médias qui couvrent la scène rap francophone. Le but étant de récompenser les artistes, labels, ainsi que les acteurs et actrices des cultures issues des quartiers populaires qui ne reçoivent que très peu de récompenses dans les cérémonies traditionnelles. Le fossé entre ces deux mondes n’a fait que s’agrandir ces dernières décennies avec des manques de respects réguliers à la culture Hip Hop qui sont restés dans les mémoires. Le plus marquant remonte à 1998, lorsque les têtes d’affiche du rap français qu’étaient NTM, MC Solar, Stomy Bugsy et Ärsenik se sont fait voler le prix de l’album rap/groove aux victoires de la musique par le groupe de variété Manau.
Depuis, seuls des artistes devenus plus pop comme Orelsan et Bigflo et Oli peuvent se targuer de représenter régulièrement les cultures populaires aux victoires de la musique ou aux NRJ Music Awards. Pourtant, ces cultures sont ultra dominantes, comme en témoigne la liste des artistes les plus écoutés en France en 2022 sur Spotify. Jul, Ninho et Gazo arrivent en tête, suivi de 5 autres rappeurs exposant la domination musicale de ces cultures populaires. Comment le monde de la musique française peut-il encore snober ces stars pour mettre en avant des artistes de variétés touchant un public moins large ?
C’est devant ce paradoxe que les organisateurs de l’évènement ont pris conscience de l’opportunité qu’ils avaient en élaborant cette cérémonie, redonner à ces cultures ce qui leur appartient. ‘Une cérémonie pour nous, par nous’ comme ont pu dire certains invités, qui récompense les rappeurs mais aussi le RnB, la musique caribéenne ou encore la rumba congolaise. Pourtant, Yard et Booska P auraient pu être refroidis par les premières tentatives de cérémonies dédiées au rap tel que Trace Urban ou encore l’année du Hip Hop qui n’avaient pas fait l’unanimité. Les Flammes ont été animées par Fadily Camara et Driver, vue par beaucoup comme une encyclopédie du rap. La première Edition des Flammes a remis 21 prix allant de l’album rap de l’année au meilleur clip, en passant par la Flamme éternelle remis au Rat Luciano pour sa carrière légendaire. Le système de vote prenait en compte les votes du public ainsi que l’avis d’acteurs du monde des musiques Hip Hop. D’autres anciens du milieu ont été mis à l’honneur tel que Mac Tyer. La légende de Seine Saint Denis a eu l’occasion d’interpréter son couplet issu de 93 Hardcore, offrant une séquence iconique durant laquelle une bonne partie de la salle s’est levée pour acclamer le Général. D’autres artistes ont eu l’occasion de performer et certains ont même interprété des morceaux en exclusivité comme Gazo et Damso qui ont chanté La Rue, avant de le rendre disponible sur les plateformes de téléchargements.
Les critiques sur la cérémonie sont dans l’ensemble plutôt positives même si certains signalent un léger manque de réaction du public. Le point fort s’avère être les performances sur scène qui ont marqué les esprits, a l’image de celle de Shay accompagnée de danseuses et qui finira sa prestation en haut d’un faux immeuble érigé sur scène. Les fans ont pu suivre la cérémonie sur la chaine Youtube de Booska-P, sur la chaine Twitch de Maxime Biaggi, ainsi qu’en différé sur W9. La retransmission du live sur Youtube à dépassé le million de vues, symbolisant la réussite de cette première édition. Le monde de la musique des cultures populaires espère que les Flammes vont parvenir à perdurer et à s’imposer comme un rendez-vous incontournable de la culture Hip Hop francophone.