J’étais seule dans mon appartement. Une chanson mélodieuse me revenait. J’entendais comme au loin un prénom : Étienne. Un seul mot qui se répétait trois fois dans ma tête « Étienne, Étienne, Étienne ». Je cédais à la tentation de l’écouter. Je tapais sur mon clavier ce prénom si prometteur. Apparu alors la version de Chris (anciennement Christine and The Queens). Elle l’interprétait en live sur France Inter. Je découvrais une voix douce, celle d’un ange tombé du ciel.
C’était extrêmement paradoxal de voir une gueule d’ange interpréter un morceau si suave. « Au ralenti, je soulève les interdits » disait-elle. Les paroles que Chris interprétait lui collaient à la peau. Elle qui admirait la langue française, jouant avec, incarnait cette chanson à merveille. « Reste allongé, je vais te rallumer » poursuivait-elle.
Je poursuivais mes recherches quand tout à coup YouTube me suggéra « Étienne d’Afida Turner ». Je restais interloquais. Afida Turner, cette femme indomptable à dans sa folle vie, a interprété cette chanson ? Attirée par un malin plaisir je cliquais. Je tombais des nues. Trois cliquetis introduisent la chanson, accompagnés par un battement tonique. S’invite alors un piano au son grave. La voix d’Afida Turner se réveille alors, une vraie tigresse. Elle se met à émettre des sons à la fois aiguës et graves et à chanter ce prénom qui m’obsède : Étienne. Elle commence : « Étienne, Étienne, Étienne. Baiser salé, sali, tombé le long du lit ». J’imagine une scène : obscurité intense, draps blancs en pagaille. « Au ralenti, je soulève les interdits » continue-t-elle.
Une telle métaphore reste gravée en moi. Je ressens jusque dans mon sang battre la langue de Molière. Afida transmet à la perfection un sentiment démesurément libertin. « Affolé, affolant », je suis sous l’emprise d’une chanson qui me fit tressaillir. Je goûte moi aussi à l’after beat, et j’y reviens, comme une addiction. « Reste allongé, je vais te rallumer » indique-t-elle. De sa voix, elle sort les griffes. Je songe alors : et si Étienne se transformait en « Et tienne ? ». Intérieurement, je brûler d’envie d’être celle.
Je voulais rencontrer cet Étienne mal léché, alléchant. Comme par magie, Afida ressent ce que je ressens : « Je me sens étourdie » dit-elle. Mon cœur bat, mes jambes tremblent, ma voix chante. J’entendais la guitare électrique dont le son glissait sur ma peau. « Si je te mords et encore et encore ». J’imaginais une scène suave, un souffle chaud dans le dos, deux corps à corps d’une nudité pure. La voix d’Afida se déchaîne, elle monte à son paroxysme. « Il aime à la folie ».
En effet. Je connaissais la chanson sur le bout des doigts. Je faisais corps avec elle. Etienne m’avait sous son emprise, charmé. Mon corps parlait de lui-même, affolé par cet effet sonore, d’une puissance inimaginable. Aussi, pensais-je le meilleur moyen de résister à la tentation c’est d’y céder.
Je me demandais enfin, comment Guesch Patti avait pu donner naissance à une chanson si enivrante. C’était un chef-d’œuvre, un désir sublimé en chanson, des paroles sensuelles, une imagination qui bouillonnait de plaisir. Une folie que l’on a envie de vivre, un Etienne que l’on rêve de connaître, un fantasme à jamais inassouvi mais des paroles qui restent gravées dans la peau par un corps-à-corps au rythme endiablé. L’auteur a grâce à cette chanson, fait, une poésie. Etienne est une ode au romantisme français. Elle incarne un imaginaire tant désiré, emploie des mots d’une douceur exquise pour nous transporter dans un voyage alléchant. L’incarnation de cette chanson par la voix rauque d’Afida Turner met l’art à son paroxysme. Un vrai délice mélodique.
Afida Turner interprète Étienne
Chris en live sur France Inter
Guesh Patti a créé Étienne en 1988