Points de lumière réunit six œuvres couvrant presque quarante années de production de l’image en mouvement, témoignant de l’étendue et la profondeur de la collection vidéographique du Musée. Cette sélection explore l’interaction entre les propriétés du médium, toujours en évolution, et le contenu conceptuel, social ou psychologique des œuvres – entre de minuscules pixels de lumière et de vastes champs d’illumination esthétique et intellectuelle.
De type essayiste et documentaire, infléchie par Internet, la saga sur la finance, le combat et l’eau de Hito Steyerl, Liquidity Inc., donne le ton. Présentée dans un cadre sculptural, elle demande aux membres du public de s’asseoir sur des tapis de judo posés sur une structure apparemment à la dérive sur des vagues générées par ordinateur et des séquences d’actualités traitant d’ouragans et de tsunamis.
De l’iconoclaste légendaire Jean-Luc Godard, figure de proue de la politique en art cinématographique, Scénario du film Passion est une enquête philosophique pénétrante dans laquelle Godard revisite le scénario de son propre film Passion. Dans la même salle, Loop Through de Gary Hill offre un double portrait de l’actrice Isabelle Huppert que l’on voit sur deux écrans installés à la verticale et placés de manière à refléter la distance entre les deux caméras qui l’ont filmée simultanément. Avec le public, cela crée une triade déroutante que vient accentuer la présence d’une jeune Huppert dans l’œuvre de Godard, montrée tout juste à côté.
Prepared Piano for Movers (Haussmann) d’Angelica Mesiti et Telephones de Christian Marclay tirent malicieusement chacune leur musique à partir d’activités quotidiennes : la première œuvre montre des déménageurs de piano transportant l’instrument encombrant dans un escalier en colimaçon parisien, les secousses et les mouvements de cette ascension déclenchant des sons musicaux ; la deuxième est un montage d’extraits de films hollywoodiens dans lequel on voit des scènes où divers personnages non reliés composent un numéro de téléphone, suivies de téléphones qui sonnent et d’une série de personnes qui y répondent, proposant ainsi un standard humoristiquement dysfonctionnel fait de bris de communication.
La confrontation passionnée de Godard avec le processus de création, le combat pour combler le vide vertigineux de la page blanche, anime également Unwriting de Nelson Henricks, une ode habile et rythmique sur le sens du monde, présentée sur quatre écrans, qui explore de belle manière les écarts entre les mots, les sons et les images.