C’est en visitant l’exposition Pierre Laroche : Où allons-nous ? Un p’tit bilan que l’on découvre l’exposition Clin d’œil d’Éric Lamontagne constituée de tableaux et d’objets peints jalonnant le parcours du visiteur. Artiste du trompe-l’œil et Cabaniste à ses heures, Lamontagne infiltre l’exposition bilan en y déposant des œuvres évoquant à la fois l’espace de la rue et la galerie en montage (ruban à mesurer, plaque d’égout, outils, cônes orange, flaques d’eau, etc.) auxquelles il ajoute deux tableaux de paysages lacérés révélant la fragilité de notre environnement.
Lamontagne s’intéresse à la relation antinomique entre la fin du paysage et sa contemplation, de même qu’à la mort maintes fois annoncée de la peinture. Cette analogie entre la décrépitude du paysage et la désuétude de la peinture a inspiré son processus. L’artiste a décidé de découper ses tableaux représentant un paysage et de réutiliser les découpes à même la toile pour en faire des objets de consommation en 3D. Ces soustractions de canevas défigurent en partie les tableaux de paysages. En recomposant la toile en trompe-l’œil d’objets sculpturaux, il met en quelque sorte en application la théorie du cubisme où les objets peints sont visibles de tous les côtés et émergent du tableau. Ici, l’illusion devient désillusion.
Cette stratégie des objets peints est reprise dans l’espace de la galerie dans un désordre intentionnel. L’artiste s’intéresse à créer un pont avec les œuvres de Laroche. Par exemple, il positionne une corneille naturalisée perchée sur un escabeau qui semble contempler le tableau Détour représentant une boule de neige où un oiseau noir vole au-dessus de panneaux de signalisation contradictoires. Lamontagne souhaite, par ce dialogue visuel, offrir une trame narrative où il y a une forme de mise en abyme : une exposition dans une exposition.
Cette association entre l’extérieur en construction et l’intérieur en montage tisse un parallèle poétique sur l’état du monde en devenir. Pour Lamontagne, c’est la rédemption par l’art : « Les accessoires de circulation et outils, métamorphosés en œuvres d’art, sont en train de devenir un tableau sous nos yeux. »