Peinture fraîche et nouvelle construction – 14e édition : Amber Agarand, Cristine Andrew-Stuckel, Rachel Anzalone, Tiffany April, Mel Arsenault, Laura Baril, Zahra Baseri, July-Ann El Baze, Camille Biron, Amanda Borbridge, Eric Cameron, Chloë Cheuk, Marc-Antoine Cloutier, Marie-Hélène Coutu, Ioana Dragomir, Tia Furstenberg, Fanny H-Levy, Vincent Hinse, Janelle Janz, Andreanne Yevrah Jones, Philip Kanwischer, Koei Kao, Nancy Lam, Catherine Landry, Matthew Lapierre, Magalie Leclerc-Casavant, Kyrsten Lofts, Kerry Maguire, Tyler Matheson, Stéphanie Matte, Aralia Maxwell, Kevin McKenzie, Paula McLean, Walter Moodie, Sarah Moreau, Kristin Morthens, Mohadese Movahed, Kelly O’neill, Mat O’Hara, Cassie Paine, Eugene Park, Lauren Pelc-McArthur, Marie-Soleil Provencal, Arianna Richardson, Diana Roelens, Samuelle Rousseau-Lamontagne, Michaëlle Sergile, Julien Benoit Simard, Malina Sintnicolaas, Josianne Smit, Kelsey Smith, Sophie Stefanovitch, Chad Vaudry, Aggie Veale, Tait Wilman.
L’exposition Peinture fraîche et nouvelle construction présente chaque année la quintessence de la jeune création canadienne, avec une sélection d’œuvres d’étudiants choisis dans treize universités à travers le Canada. L’édition 2018 reflète une fois de plus la diversité de leurs inspirations et une grande variété de styles et de techniques pratiquées.
Certains des artistes émergents chamboulent les spécialisations traditionnelles telles qu’enseignées dans les universités, intégrant dans leur pratique de sculpteur.trices et de peintres la vidéo et l’imagerie numérique, le recyclage, l’électronique, ou encore la céramique et le tricot… Ainsi, Philip Kanwischer (Nova Scotia College of Art and Design), qui s’intéresse à la perception fantastique de la vie sauvage, présente une sculpture accompagnée de plusieurs photographies manipulées numériquement. Les œuvres de Julien Benoit-Simard (Université de Bishop, Sherbrooke) contiennent toutes des allusions aux jeux vidéo et à la réalité virtuelle. De vraies manettes de jeux pendent au bas de dessins représentant des massacres, interpellant le regardeur sur la violence véhiculée par les productions audiovisuelles ludiques. Nombreux sont les étudiants qui pratiquent le recyclage et la récupération d’objets issus du quotidien. Arianna Richardson (NSCAD) en fait le cœur de sa pratique, transformant des déchets en de sublimes enseignes clinquantes. Ses cartouches multicolores contiennent des mots du champ lexical de la poubelle (Trash, Reuse Bin, Garbage Party…).
Quand elles sont figuratives, certaines des œuvres jouent avec nos émotions : pustules, cerveau humain, mollusques inspirent d’autant plus le dégout que leur facture est réaliste. Mais une certaine beauté peut aussi se dégager de ces motifs prosaïques, ainsi que de la poésie. Les coquilles d’œufs de July-Ann El Baze (Bishop) évoquent la fragilité du monde et les rêves brisés. De la même manière, la délicatesse des lettres d’amour en céramique d’Iona Dragomir (Université de Waterloo) exprime la nostalgie ineffable des amours perdues. Une certaine provocation se fait jour dans l’œuvre de plusieurs étudiantes: Zahra Baseri (Université de Waterloo) présente entre autre une chaise phallique ornée d’un minaret Erected Chair faisant à la fois référence à la tradition de l’art érotique et aux valeurs patriarcales de l’Islam.
A l’heure du tout numérique, le flot d’image que nous voyons chaque jour influe sur notre appréhension de la réalité. Certains artistes questionnent cette évolution de la représentation. C’est le cas de Jean Borbridge (Université du Manitoba) dont les portraits photographiques jouent avec notre perception : chaque image contient un autre cliché pris au même endroit, le visage de la personne photographiée ayant été peint au préalable. Ainsi, le sujet se dérobe, les plis de l’image se confondant avec les plis du corps et avec ceux du décor. De son côté, Mel Arsenault de Concordia crée des sculptures à la frontière de la représentation. Ses installations couleur pastel contiennent des formes arrondies tantôt minérales, tantôt organiques ou encore des éléments atmosphériques ou architecturaux. Le résultat final évoque des paysages inventés et une ambiance onirique sans que jamais l’on puisse nommer ce que l’on regarde.
Outre les nombreuses citations à l’histoire de l’art, l’exposition regorge de calembours visuels. Stéphanie Matte (Laval) trace avec une grande finesse des dessins absurdes dont les titres (La Mort du Serpent-Jambon déguisé en ananas) reflètent bien l’extravagance. Cassie Paine (OCAD) crée des œuvres à partir de matériel de signalisation et d’outillage. Son banc réalisé avec des panneaux arrêt semble inviter le visiteur à prendre une pause, à cesser sa course et apprécier le moment présent. Dans Dependance de Chloe Cheuk (Concordia) deux ampoules installées à la perpendiculaire se frôlent. L’une d’elle est raccordée au courant électrique et transmet une partie de son énergie à l’autre, lui permettant de briller, plus faiblement cependant. Ses sculptures évoquent de manière subtile les relations interpersonnelles.
Il est difficile de faire un exposé exhaustif d’une exposition réunissant plus d’une quarantaine d’artistes. Nous espérons que ce texte vous aura mis en appétit, comme les Petits fours d’Aralia Maxwell (NSCAD), minuscules sculptures imitant à la perfection des pâtisseries succulentes, cerises sur le gâteau de Peinture fraîche et nouvelle construction.