La Galerie Virginie Louvet a le plaisir de présenter Transfert, première exposition individuelle de Margherita Chiarva en France. Une proposition de Carlotta Loverini.
Une composition et seize pièces photographiques sont exposées. Des photos Polaroid prises en pleine lumière, remastérisées, prélevées, transférées sur de la gaze ou du papier puis retravaillées avec des encres ou de la tempera jusqu’à renaître sous une forme totalement inédite. Une composition sur le mur du fond faite de 16 tableaux complète l’exposition.
Il s'agit d'une série d’oeuvres puissantes autant que délicates, dans lesquelles l’artiste transfère son flux de conscience au corps : la douceur de courbes féminines et la forme culte du polaroid jouant l’un et l’autre le rôle de supports pour ces images quasi abstraites, métaphores de rêves éveillés. Soit, la capacité, selon Freud, d’exprimer notre imaginaire en tant qu’adultes ayant abandonné les jeux d’enfants.
« Ce qui compte n’est ni la réalité, ni sa représentation, mais la manipulation de la réalité dans l’esprit de l’artiste » Margherita Chiarva.
Pour produire ces suggestions, Margherita Chiarva n’a pas eu recours à des techniques photographiques traditionnelles mais à des ombres, des maniements et traitements chimiques de la surface du papier, de manière à « inscrire » les images sur le polaroid.
Un transfert de sa sensibilité artistique à la peau humaine et à l’épiderme chimique du film polaroid, à la fois matière des manipulations et référence classique à l’histoire de l’art. Voici le fil rouge de l’exposition qui s'inscrit dans l’espace intimiste de la Galerie Virginie Louvet.
Ce processus de transfert rend chaque pièce unique, un original que même l’artiste ne serait capable de reproduire, puisqu’il n’existe aucun négatif de la photographie d’origine. Le cadre blanc traditionnel qui protège l’image, comme une robe qui protège la vulnérabilité d’un corps, est absent, évitant de distraire l’attention de l’objet culte, la photo polaroid, de l’image et du contenu. Toute l’attention est concentrée sur le message inconscient exprimé par l’image.
L’image détachée de son support est ensuite transférée sur une bande de gaze ou un papier pur coton. L'oeuvre est ensuite travaillée par ajouts de couches d’encre et de tempera.
Ce processus fait l’objet d’innombrables répétitions, au fil desquelles, couche après couche, l’artiste se défait du passage du temps. Le processus ne prend fin que quand l’artiste replace la surface plastifiée originelle du polaroid, soit, la couche finale. C’est le dernier acte du processus, qui vient interrompre la manipulation de l’image et enclore l’oeuvre dans un moment éternel tout en plaçant l’objet dans une réalité physique qui a sa place dans le temps et dans l’espace.
« Le fait d’imprimer et de re-mastériser confère à l’image une beauté tactile et une impression de permanence. La photographie est une image qui devient dans ces oeuvres un objet tangible. » Margherita Chiarva
Des actes de réélaboration qui nous rappelle toute une génération de photographes voués à l’intervention artistique sur l’image, quitte parfois à utiliser des moyens qui ont pour effet de dissimuler « le geste de l’artiste ». Cette méthode de travail produit des niveaux d’interprétation qui, contenus dans l’oeuvre, créent une forme de lien d’empathie, intuitif et inconscient, entre l’artiste et l’observateur. Les images sont ressenties plutôt que simplement observées.