Doka (chambre noire) est le titre de la nouvelle exposition de M, organisée par le commissaire invité Geert Goiris. Le photographe belge revient ainsi au musée après son exposition individuelle en 2013. L’obscurité constitue le biotope d’une collection d’art. La plupart des œuvres d’art ne voient en effet que rarement la lumière du jour. Mais à l’instar d’une chambre noire, ce lieu magique où l’on développe des photographies analogiques et où apparaissent les images, Goiris souhaite concevoir cette exposition comme un espace dans lequel les images s’illuminent à partir de l’obscurité.

Geert Goiris vit et travaille à Anvers. Il parcourt le monde en quête de lieux insolites pour les traduire en images énigmatiques. Inspiré par le concept ambigu de la « haute-fidélité » (une technologie qui se rend pour ainsi dire invisible ou inaudible afin de se rapprocher de « l’original »), il utilise des caméras analogiques grand format et des films scientifiques plus sensibles que l’œil humain. Malgré l’abondance de détails, son œuvre suscite souvent la sensation que quelque chose fait défaut. Ce manque d’informations stimule l’imagination du spectateur ou de la spectatrice. L’absence de repères temporels clairs engendre l’impression que nous regardons simultanément le passé et le futur.

Ses œuvres ont intégré les collections, entre autres, du Seattle Art Museum (États-Unis), de la Hamburger Kunsthalle (Allemagne), du FOMU (musée de la photographie, Anvers, Belgique), du Centro de Arte Caja de Burgos (Espagne) et du Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris (France).

Un nouveau regard porté sur l’inconnu

« L’attention est le début de la dévotion ». La poétesse Mary Oliver, aujourd’hui décédée, mettait en garde contre le fait de regarder sans remarquer. Sa voix résonne comme une urgence à l’ère actuelle de la distraction et de la dispersion.

Les espaces familiers où nous passons le plus clair de notre temps sont souvent fortement définis par des habitudes et des routines bien ancrées, voire figées. Ce que l’on y voit est tronqué en hypothèses plutôt qu’en perceptions. Les œuvres exposées dans l’exposition Doka ébranlent la quotidienneté, parfois de manière subtile, d’autres fois explicite, et nous invitent à jeter un regard nouveau sur ce qui nous est familier. Elles oscillent entre limpidité et opacité, abstraction et figuration, curiosité candide et désir de contrôle. Tout au long de l’exposition, une houle semble rouler de l’inaccessible (le paysage) au familier (l’intérieur), et vice-versa.

Supports et techniques variés

L’exposition Doka englobe des supports et techniques variés. Les œuvres vidéo relient un certain nombre de points d’intérêt et constituent l’épine dorsale de l’exposition. Plusieurs vidéos se déroulent en temps réel : le temps de visionnage est égal à la durée de la prise de vue. Elles invitent à la concentration ; qui la visionne prête attention au passage tangible du temps.

L’exposition présente également des sculptures et des installations, des œuvres graphiques et photographiques. Les artistes jouent avec des objets et des personnages du quotidien. En les remodelant, les retravaillant et les copiant, ceux-ci acquièrent de nouvelles significations. Ainsi, notre regard est convié à relire ce qui se trouve sous nos yeux et à établir nos propres associations.

Sous la devise « L'attention est à l'origine de la ferveur »1, Doka réunit les artistes suivants : Leyla Aydoslu, Younes Baba-Ali, Dirk Braeckman, Raphaël Buedts, Paul Casaer, Honoré d’O, Lili Dujourie, Jef Geys, Gerard Herman, René Heyvaert, Ann Veronica Janssens, Jan Kempenaers, Valérie Mannaerts, Hana Miletić, Peter Morrens, Hilde Overbergh, Ria Pacquée, Benoît Platéus, Kato Six, Gintauté Skvernyté, Walter Swennen, Joëlle Tuerlinckx, Michael Van den Abeele, Philippe Van Snick, Richard Venlet, Jan Vercruysse, Marthe Wéry.

Toutes les œuvres exposées proviennent des collections de Cera, de la Communauté flamande et de la Ville de Louvain, qui sont toutes conservées et gérées par la Ville de Louvain.

(Commissaire : Geert Goiris)

Notes

1 Attention is the beginning of devotion – Mary Oliver