Vingt-cinq ans après la dernière exposition qui lui était consacrée, le Jeu de Paume – Château de Tours présente cet automne une rétrospective consacrée à René-Jacques. Étudiant en droit, ce qui le prédestinaient à une tout autre carrière, il fait très rapidement le choix de suivre la voie artistique et d'adopter définitivement son nom d'artiste, afin de s'adonner à sa passion : la photographie.
« L'élégance des formes » dévoile une sélection de cent vingt tirages originaux, dont certains montrés pour la première fois, à travers un parcours rythmé par huit sections chrono-thématiques qui retracent les thèmes emblématiques de l'œuvre de ce photographe qui demande a être redécouvert. Figure marquante de la photographie française d’après-guerre, René-Jacques (né René Giton, 1908-2003) débute sa carrière dans les années 1930. Très rapidement, il embrasse les mille métiers de la photographie, se faisant tour à tour reporter pour L’Intransigeant, illustrateur pour les éditions Grasset ou photographe industriel pour la régie Renault. Arpenteur des rues d’un Paris vide, sur les traces de Carco et Léon-Paul Fargue, il est aussi photographe de plateau pour Lucot, Pabst et Grémillon.
Conscient de la difficulté des photographes à faire valoir leurs droits et reconnaître leur art, René-Jacques, comme François Kollar, son aîné, ou Jean Dieuzaide, son cadet, participe aux différents groupes qui animent la photographie française : Le Rectangle, sous l’égide d’Emmanuel Sougez ; le Groupe des XV, à partir de 1946, où il retrouve Daniel Masclet, Willy Ronis, Robert Doisneau et son ami Marcel Bovis. Défendant ses images et ses points de vue, il participe aux nombreuses expositions que ces groupes organisent. Président pour les photographes du conseil d’administration de la Spadem (Société de la propriété artistique des dessins et modèles) à partir 1946, il prend également la tête du syndicat de la photographie publicitaire en 1961 et représente les photographes à la Commission nationale des sites.
Dans les photographies de René-Jacques, rien n’est anodin : chaque image est pensée et trouve sa source dans ses expériences préalables. Ainsi, quand il propose des illustrations pour des œuvres de Carco et de Montherlant, il traduit en images les ambiances et les formes évoquées par les textes. De même, le jeu des ombres et des reflets sur les matières, qu’il affectionne dans ses natures mortes industrielles, fait suite à ses premières recherches et à son expérience de l’éclairage sur les plateaux de cinéma. Pour René-Jacques, professionnel exigeant, répondre aux demandes de ses commanditaires suppose de proposer, au-delà d’une image techniquement parfaite, un supplément d’âme et une vision renouvelée du paysage, du monument ou de l’objet industriel.
En 1991, conscient de la richesse de son travail photographique, il fait don à l’État de son œuvre. Aujourd’hui conservée à la Médiathèque de l’architecture et du patrimoine (MAP), la donation René-Jacques regroupe ses négatifs, un ensemble de plus de 20 000 tirages, ainsi que de très riches archives formées de ses publications, de sa correspondance professionnelle et des planches de tirages de lecture qui servaient à la diffusion de ses images.