Depuis sa retraite dans la campagne des Ardennes flamandes, Patrick Van Caeckenbergh règne sur le monde. Un monde personnel, qu’il a aménagé selon ses propres souvenirs et ses propres désirs. Dans cet univers parallèle, qui présente une grande ressemblance avec le nôtre, mais qui en est en même temps très éloigné par sa propre logique interne, Patrick Van Caeckenbergh joue avec ses idées comme un chaton avec une pelote de laine.
À l’instar de Monsieur Teste de Paul Valéry, Patrick Van Caeckenbergh s’est créé une île intérieure et il perd son temps à l’explorer et la consolider. Il part en quête de la délectation de ces instants où la pensée joue simplement avec son existence, la félicité de l’invention solitaire. Il se sent un vrai pantologue: une personne qui aime tout au monde.
La diversité du monde est explorée par la méthode de la collection, du classement et du recensement, avec un recours libre à la taxonomie et à la généalogie, à la cartographie et à la cosmogonie. L’unité du monde est reconstituée par la technique du collage et de l’assemblage. Mais l’étude n’est pas systématique. L’attitude de l’artiste n’est pas celle du scientifique mais celle du bricoleur. Au lieu de dresser la carte du monde, il crée des mondes nouveaux dans lesquels l’érudit en chambre qu’il est part en voyage d’exploration dans un étonnement constant.
Plus il s’efforce de saisir la vie, le monde et le cosmos dans un seul système, plus il s’en éloigne. Ses tentatives effrénées sont une belle illustration du paradoxe du métier d’artiste. L’artiste est enfant de son temps et s’active dans la pleine vie. Mais en même temps, il possède la faculté de demeurer continuellement décalé par rapport à celle-ci.