La photographie a toujours été pour moi une sorte de miroir à double-face. Un côté reflétant mon sujet, l’autre me reflétant moi-même.
(Richard Avedon)
Gagosian a le plaisir d’annoncer Iconic Avedon: A Centennial Celebration of Richard Avedon. L’exposition marque le centenaire de la naissance d’Avedon en mai 1923. Souvent attribué à ses photographies, le terme iconique s’applique autant aux œuvres qu’à leur auteur, le terme est ici utilisé dans le titre de l’exposition pour souligner son influence exceptionnelle sur la culture d’aujourd’hui.
Peu après avoir installé son atelier à New York au milieu des années 1940, Avedon a développé un style à la fois inventif, sophistiqué et immédiatement reconnaissable. Photographe pour Harper’s Bazaar (1944–65) puis Vogue (1966–88), il a réalisé des images parmi les plus novatrices et les plus marquantes. A mesure que sa notoriété grandissait, les figures majeures du vingtième siècle – performeurs, écrivains, artistes, intellectuels et autres personnalités – ont fait appel à lui pour se découvrir sous son objectif. Avedon a produit des images qui sont devenues synonymes de la légende de leur modèle. En présentant ses photographies de célébrités et d’inconnus, l’exposition souligne le rôle fondamental d’Avedon en tant que créateur d’icônes.
Les portraits les plus marquants d’Avedon témoignent de sa capacité incroyable à capturer la singularité de ses modèles et saisir leur essence sur le vif, les portant – même ceux qui sont déjà célèbres – au rang de figures illustres de notre histoire vivante. Ses portraits de Marian Anderson (1955), Marilyn Monroe (1957), Bob Dylan (1965) et des Beatles (1967) sont autant iconiques qu’intemporels. « Ce n’est pas moi dans mon apparence » observe un des modèles d’Avedon, Harold Brodkey, sur son portrait, « c’est moi dans mon essence ». Grâce à un œil infaillible, un timing impeccable et une sensibilité visionnaire, Avedon a propulsé Dovima (1955), China Machado (1958) et Penelope Tree (1967) au sommet de leur profession. Il a également réalisé des portraits exceptionnels de Charlie Chaplin (1952), Jacqueline Kennedy (1961), Andy Warhol (1969) et Tina Turner (1971) à des moments-clés de leur vie.
Ouvrant lors de la semaine de la Haute-Couture à Paris, Iconic Avedon témoigne de ses liens profonds avec la capitale française qui fut sa première source d’inspiration. Après s’être rendu à Paris en 1947, Avedon y est souvent retourné afin de photographier les collections de la Fashion Week pour Harper’s Bazaar. Il a ainsi collaboré avec des éditeurs comme Carmel Snow, Diana Vreeland et Nancy White mais aussi des créateurs comme Christian Dior, façonnant une nouvelle vision audacieuse de la femme moderne et faisant à nouveau rayonner la grande ville après la Seconde Guerre mondiale. Représentant ses modèles en mouvement et dans la rue, libérés du cadre confiné de l’atelier, il a réalisé parmi ses photographies les plus connues à Paris, notamment Dovima et les éléphants (1955) et Brigitte Bardot (1959). C’est également à Paris qu’il a réalisé les portraits, évoquant l’élégance de la moitié du vingtième siècle et aujourd’hui considérés comme des classiques, de Dorian Leigh (1949), Suzy Parker (1957–58), Coco Chanel (1958) et Alberto Giacometti (1958), qui sont présentés dans cette exposition.
Largement imité, Avedon s’est sans cesse questionné afin de se réinventer, tout particulièrement lors de ses commissions ou de ses projets personnels. Privilégiant par la suite un fond blanc et uni, les contrastes de tons et les poses frontales, il s’est intéressé à des sujets qui étaient, jusqu’alors, dans l’ombre des projecteurs, les érigeant eux aussi en icônes. L’exposition parisienne comprend notamment sa représentation saisissante de William Casby en 1963, l’une des dernières personnes à être née en tant qu’esclave ; The Family (1976), montre un groupe d’hommes de pouvoir américains posant à l’occasion du bicentenaire des États-Unis ; des images issues de la série In the American West (1979–84), son exploration captivante du cœur de l’Amérique, ainsi que sa représentation candide de la sculptrice June Leaf (1975), un portrait monumental qu’Avedon considérait comme l’un de ses préférés.
Conscient de son pouvoir en tant que créateur d’images, Avedon se soumet parfois lui-même à sa propre représentation. Dans un autoportrait qu’il a réalisé dans un photomaton l’année où il publie Nothing Personal (1964), créé avec son ancien camarade de classe James Baldwin, il recouvre la moitié gauche de son visage d’une partie du portrait de son collaborateur (Baldwin n’ayant pu se joindre à la séance). Avedon souligne ainsi leur lien, peu après l’adoption mouvementée de la loi sur les droits civils. Dans un autoportrait plus tardif datant de 1993, les contours rugueux du visage d’Avedon, âgé de 69 ans, apparaissent sans aucun apparat.
L’exposition Iconic Avedon, dont la scénographie a été conçue par Cécile Degos, fait suite à l’exposition Avedon 100 qui s’est tenue en 2023 à la galerie de New York, qui présentait des photographies sélectionnées par plus de 150 personnalités de premier plan : artistes, créateurs, musiciens, écrivains, commissaires d’exposition, figures de la mode, qui témoignent, dans le catalogue de l’exposition, de l’impact de l’œuvre du photographe aujourd’hui.
Richard Avedon est né à New York en 1923 et est décédé à San Antonio en 2004. Ses œuvres sont incluses dans les collections du Smithsonian Institution à Washington DC ; Metropolitan Museum of Art, New York ; Museum of Modern Art, New York ; Centre Pompidou à Paris et de nombreuses autres collections dans le monde entier. La première rétrospective muséale d’Avedon a eu lieu au Smithsonian Institution de Washington DC en 1962. Elle a été suivie par de nombreuses autres expositions monographiques majeures, notamment au Minneapolis Institute of Art (1970) ; Metropolitan Museum of Art, New York (1978 et 2002) ; Whitney Museum of American Art, New York (1994) puis, à titre posthume, au Louisiana Museum of Modern Art, Humlebæk, Danemark (2007, l’exposition a ensuite voyagé à la Fondazione Forma per la Fotografia, Milan, Italie ; Jeu de Paume, Paris ; Martin-Gropius-Bau, Berlin, Foam, Amsterdam ; et au San Francisco Museum of Modern Art jusqu’en 2010). En 2004, Richard Avedon a créé la Richard Avedon Foundation, un fond qui rassemble ses photographies, négatifs, publications, documents et autres archives.