L’intuition a toujours intrigué par son instantanéité et paradoxalement, par son incroyable exactitude ! Le mot intuition vient du latin intuitio qui signifie : « acte de voir d’un seul coup d’œil ». Mais ces origines sont très anciennes et demeurent mystérieuses. Si certains disent que c’est le hasard qui opère, ou une certaine notion de survie qui prend les commandes de notre raison, d’autres préfèrent défendre la thèse que l’intuition est divine.
Ce qui est commun à toutes les approches, c’est que l’intuition fait apparaître comme évident, une solution immédiate à une situation, sans qu’aucun raisonnement n’ait eu lieu. Platon disait que l’intuition est la saisie immédiate de la vérité par l’âme elle-même. Alors que Spinoza pensait que l’intuition est dépendante de la compréhension des choses et de leur finalité par la raison. Einstein la définissait comme une « sensation au bout du doigt » (fingerspitzengefühl). Quant aux neurosciences, elles reconnaissent aujourd’hui qu’elle peut être une alliée de qualité dans notre vie de tous les jours. Mais si toutes ces théories semblent opposées, elles ne sont pour autant pas incompatibles ! Et comme très souvent il est nécessaire d’aller au-delà des apparences et au-delà d’une définition sociétale trop restrictive, pour mieux comprendre cette notion pour le moins impalpable.
Selon la philosophie bouddhiste, il existe un lien certain entre l’instant présent, notre pleine présence et nos capacités intuitives et sensitives. Plus précisément, l’intuition permet d’entrer ponctuellement en contact avec un degré de présence suffisant pour discerner certaines connaissances qui sont, à l’image du fonctionnement des cellules du corps, encodées en nous-mêmes. L’intuition est donc à mon sens relié à la notion d’éveil. Mais l’intuition, ainsi que cette sensation de connaitre la vérité de façon évidente, parfaite et immédiate, ne dure rarement plus qu’une fraction de seconde. Et s’il s’agit bien de l’éveil qui se révèle, il semble donc primordial de comprendre pourquoi il ne dure pas. Par conséquent, faire persister cet instant fugace nécessite d’avoir la possibilité d’aborder la notion d’intuition dans sa conception la plus subtile. Pour ce faire, il est essentiel d’avoir acquis la certitude de la non-existence du soi et des phénomènes. Cela est possible grâce à une compréhension complète de l’impermanence et de l’interdépendance. Dans le cas contraire, la stabilisation de l’intuition est impossible et demeurera une perception passagère et rare. Finalement, ces caractéristiques une fois développées permettront d’acquérir la vision directe de la réalité, appelée aussi Vipassana.
Apprendre à mieux se connaître et à reconnaître l’intuition quand elle apparaît, c’est donc également en apprendre plus sur nous-mêmes ! En outre, c’est aussi faire confiance en cette certitude qui surgit comme une évidence. Celle-ci même qui illumine notre conscience tel un éclair et qui n’a pour seul but que de nous aider à prendre une décision, ou à l’inverse nous éviter de faire une erreur devant un choix difficile. Alors que le concept d’éveil est entouré de mystères et d’explications trop souvent compliquées, son approche devient plus abordable si l’on expérimente son sens depuis le point de vue de l’intuition. En effet, nous avons tous vécu cet instant où nous faisons le bon choix, dans un temps si court que cela dépasse la logique et l’entendement. Ainsi, n’est-il pas plus aisé et motivant d’escalader une montagne si l’on peut en voir le sommet ?
Dans cette optique, il faudra suffisamment clarifier son esprit pour permettre à l’intuition de perdurer et donc à l’éveil de se réveiller. La méditation est donc une fois de plus une solution de premier ordre. En effet, un travail sérieux et régulier, centré sur l’état méditatif permettra d’atteindre la sagesse intuitive. Mais vous l’aurez compris, « la voix de l’intuition » vous permettra également de trouver votre voie afin de cheminer vers l’éveil.
L’intuition est un passage éclair de notre esprit d’éveil au sein de nos perceptions habituelles.