La Galerie Nathalie Obadia est très heureuse de présenter les Vitraux Mobiles de Sarkis, la cinquième exposition personnelle de l’artiste, après Intérieurs en 2018 à Paris et Il Grido en 2016 à Bruxelles.
Composée de près de 60 vitraux dont la conception et la mise en scène ont été méticuleusement orchestrées par l’artiste, cette installation frappe d’emblée par la grande impression que produit cet ensemble magistral autant qu’il émeut lorsqu’on s’attache à détailler les images qui composent cet assemblage inédit. De sources iconographiques extrêmement variées, ces photographies ont en commun leur technique ; chacune étant enserrée dans un vitrail de chevalet. Ces images sont des prises de vues de Sarkis provenant de temporalités et de géographies non explicitées ou ont fait l’objet de récupérations par l’artiste, contribuant au pressentiment d’une mémoire visuelle commune.
Procédant de photographies réalisées notamment en Inde, aux Pays-Bas, en Turquie, au Japon, en France, en Allemagne ou dans l’antre de son atelier (Tête blessée en néon, Sculpture de martyre aux films, N°4 Vitraux Atelier), Sarkis compose également avec les séries des Portraits Anonymes (les Portraits Invités) et la série des Innocents pour façonner cet édifice de verres rétro-éclairés. Le Prototype de l’Abbaye de Silvacane officie comme un jalon clé pour témoigner de l’attachement que Sarkis porte à l’artisanat de ces oeuvres en verre. Produite il y a près de 20 ans dans le cadre d’une commande publique qui lui a été passée pour les vitraux, les chaises et la barre de cristal de la chaire de lecteur pour le réfectoire de l’abbaye cistercienne, elle agit comme une catalyse qui déterminera nombre de projets autour du vitrail. Une des réalisations les plus saisissantes en sera l’exposition Ailleurs Ici au Château de Chaumont-sur-Loire en 2012, permettant la production de 72 vitraux ; autant d’instantanés essentiels extraits de sa considérable bibliothèque d’images - une anthologie à coeur ouvert dont certains éléments deviennent ici des Vitraux Mobiles.
Avec la précision et l’humilité qui caractérisent son oeuvre, Sarkis transcende la religiosité historique du médium et rend hommage à ses maîtres (Statuette féminine préhistorique, Pieds du retable d’Issenheim, Retable six images, Têtes Premiers) autant qu’à la foule des anonymes dont les clichés pris sur le vif attestent de l’extraordinaire empathie dont Sarkis fait preuve pour dire l’attachement qui le lie à toutes ces fraîcheurs constamment renouvelées. Des féroces statuettes des Innocents issues de figurines de collection jugées supposément triviales, d’un mannequin de commerce (V.84 Vitrine), d’un assemblage de poutres métalliques (V83 1 Haç simple (croix), ou d’un dos tatoué (V.53 Dos ailé), il fige en cerclant de métal ces fugacités visuelles que son oeil avisé excelle à discerner.
Cette humanité se manifeste formellement dans les cicatrisations en plomb qui dessinent cette marquetterie en verre, favorisant la jointure à la fêlure et pansant les éclats épars avec la même bienveillance qu’envers ses oeuvres en Kintsugi. L’unicité de la technique permettant ces arrêts sur images d’une considérable disparité, ces oeuvres projettent des images mentales dont l’universalité est éloquente. Loin de museler ces expressions fugitives, les Vitraux Mobiles de Sarkis agissent comme des fenêtres - ou des miroirs, qui ouvrent encore davantage le regard.
Né en 1938 à Istanbul, Turquie, Sarkis vit et travaille à Paris depuis 1964.
En 1969, il est invité par le critique Harald Szeemann à participer à l’exposition désormais célèbre Quand les attitudes deviennent formes à la Kunsthalle de Bern. En 2015, il représente la Turquie à la Biennale de Venise avec Respiro et participe à Armenity, l’exposition du Pavillon de la République d’Arménie qui remporte le Lion d’Or.