Voici pour commencer cette année 2019 avec lustre l’aboutissement -tout du moins un point d’étape- des liens tissés ces trois dernières années avec New-York. Grâce à notre participation régulière au Salon Zürcher, une minifoire en marge de l’Armory show ou de Frieze, je peux aujourd’hui vous présenter une sélection originale de sept artistes, issus du cru et qui représentent dans leurs expressions les plus variées les enjeux actuels liés à l’art abstrait.
A l’affiche pour commencer, deux noms loin d’être inconnus aux habitués du lieu. Robin Kang : cette artiste visuelle qui utilise principalement le textile pour interroger le lien unissant le manuel à la technologie la plus avancée, tout en brouillant tout repère temporel, collabore régulièrement avec la galerie depuis 2016. Marc Van Cauwenbergh : cet expatrié belge Outre-Atlantique depuis vingt-cinq ans, est présenté régulièrement à la galerie ou par elle sur des salons ou expositions hors-lesmurs depuis 2012. Vous serez ravis de retrouver à cette occasion sa colorfield painting nourrie de tradition flamande et d’énergie de la grande ville. Venons-en aux cinq « nouveaux » venus.
Timothy Atticus : le plus jeune de la sélection a connu très jeune, avant même de sortir diplômé de Cooper Union en 2011, une reconnaissance par sa participation à la Biennale du Whitney Museum en 2008. Il suit une ligne pure de la peinture abstraite, une position rejoignant celle du précédent, où l’on utilise et exploite les qualités mêmes de la peinture pour ne représenter qu’elle et tout ce que l’absence apparent de sujet puisse évoquer à celui qui le regarde.
Comme Robin, Madora Frey, Rachael Gorchov, Mary Schiliro et Daniel G. Hill dissèquent des enjeux traditionnels de l’art abstrait au XXe siècle, en supprimant éventuellement la peinture ou même toute référence picturale pour se concentrer sur la question de l’objet ou de l’abstraction tout court pour le dernier nommé.
Mary Schiliro : s’inscrit, elle, à la suite des trois premiers. Le processus, qui nomme les séries, raconte la genèse de l’œuvre. Ses recherches rejoignent toutes les problématiques abordant la question du cadre en peinture : suppression du cadre, toile libre et après ? Dès lors, il est tout-à-fait logique qu’à l’occasion ses œuvres si délicates et minimales donnent lieu à des installations où ses objets envahissent tout l’espace. Nous aurons l’occasion à Bruxelles de découvrir d’elle quelques Dip painting (peinture trempée). Madora FREY : si son travail est souvent de taille monumentale – de grands espaces à visiter et où se perdre-, il reste qu’à petite échelle, dans ses objets muraux, nous comprenons très bien son intérêt à créer des environnements lumineux et immersifs. Par l‘usage de surface réfléchissante ou lumineuse, Madora peint la lumière et l’espace. Deux Sundials, remarquables petits paysages abstraits récents nous permettront d’en faire l’expérience.
Rachael Gorchov : After painting. L’artiste rejoint de telles préoccupations, mais en se concentrant tout comme Robin sur des moyens plus traditionnels. Sa particularité est de combiner œuvres picturale et céramique. Comment dépasser la peinture, le mur … Trois œuvres nous montrent ses pistes : prolonger le mur au sol, au plafond ; mais aussi prolonger l’image bidimensionnelle par des reliefs en céramique, plus rarement en papier mâché.
Daniel G. Hill : président des artistes abstraits américains depuis 2013, artiste polymorphe, il représente la tendance la plus conceptuelle de ce panel. L’idée dicte la composition qui peut procéder de toute technique, y compris la photographie, mais souvent ces dernières années des réalisations modulaires à base de fils : métal, corde, ruban. Nous avons choisi deux œuvres récentes, en corde celles-ci, pour observer ses partis pris.
Quelle qu’en soit sa matérialité, l’image abstraite dicte toujours le même modus operandi. L’idée est à l’œuvre, la simplicité nous étonne et nous impressionne. La pensée éblouit. Ce sera une fête que de s’y plonger. Pour autant, l’art abstrait n’est pas qu’un espace de concepts réalisés, éventuellement froid. Il peut aussi être teinté d’humour, faire preuve de chaleur, de poésie, briller d’audace… Cette sélection évidemment subjective et non exhaustive de ce que le paysage new-yorkais entrain de fleurir propose de meilleur en matière d’art abstrait en est une merveilleuse preuve à l’appui.