L’exposition réunit des œuvres de Martha Rosler (Brooklyn NY) et Hito Steyerl (Berlin) à travers un dialogue qui met en évidence les correspondances entre leurs démarches artistiques, qu’il s’agisse des thèmes abordés ou des médiums employés. Pour chacune d’entre elles, il s’agit de la première exposition muséale en Suisse. C’est également la première fois que leurs travaux font l’objet d’une présentation commune, bien que leurs œuvres procèdent d’un engagement particulièrement résolu et critique dans le traitement des sujets de société à l’origine de nombreuses analogies entre leurs travaux, leurs postures et les thèmes traités, dont la portée globale montrent la conscience politique critique partagée par ces deux artistes.
Dans leurs œuvres, Rosler et Steyerl présentent la réalité en constante interaction avec les médias audiovisuels essentiels au tissu de notre quotidien et de notre identité – sans en oublier les effets disruptifs pour l’existence humaine.
Ainsi, il n’est pas étonnant que les artistes emploient constamment de nouveaux médias dans leurs œuvres. Aux côtés de la photographie et des collages, Rosler emploie depuis longtemps la vidéo pour transmettre des messages féministes et opposer d’autres images de la femme et de la modernité aux mythes véhiculés par la télévision et les magazines. Parallèlement à la photographie, aux photocollages et à d’autres formats tels que des actions et des projets, elle manifeste un intérêt grandissant pour les médias sociaux et les drones. Les dernières installations vidéo de Steyerl en partie animées par ordinateur – dont l’esthétique est profondément influencée par les univers des plateformes en ligne telles que YouTube – sont à la pointe de ce qui se fait dans le champ des arts visuels avec ce médium.
Avec leurs travaux, les deux artistes pénètrent délibérément des mondes actuellement sous tension et étudient dans le même temps leurs contextes historique et médiatique. À travers leurs œuvres, Rosler et Steyerl inventent des formules de résistance, fascinantes d’un point de vue esthétique, dirigées contre un ensemble de tendances : la normalisation de la perte de démocratie, l’économisation et la privatisation de l’espace public et des lieux de vie pour tous, la violence privée, étatique et la répression, la réduction de l’homme à une valeur de main-d’œuvre et de consommateur, ainsi que la militarisation de la vie en société. Tout en renonçant au pathétique, l’exposition ne s’attache pas moins à l’idée qu’il demeure indispensable, face à la montée des opinions réactionnaires dans le monde entier, de continuer à montrer des œuvres d’art qui défendent avec audace la préservation des structures démocratiques, les valeurs de la société civile et la tolérance.