Tornabuoni Art, fidèle à sa tradition de recherche et de diffusion de l’œuvre des maîtres qui ont fait basculer l’art italien du moderne au contemporain, dédie sa prochaine exposition au travail d’Alberto Burri. De ses débuts au camp de prisonniers de guerre au Texas (1946) jusqu’à la série des « Cellotex » des années 1990, en passant par les « Sacchi » des années 1950, les « Legni », « Ferri » et « Combustioni » des années 1960 et les « Cretti » des années 1970, plus de trente œuvres retraçant la carrière de l’artiste seront exposées.
Plus de quarante après la dernière rétrospective consacrée à l’artiste en France (Musée National d’Art Moderne, 1972), l’exposition présente la carrière révolutionnaire d’un artiste aujourd’hui considéré comme un point de référence fondamental parmi les artistes de sa génération en Europe comme aux États-Unis. Alberto Burri est, aux côtés d’artistes tels que Lucio Fontana, Yves Klein et Robert Rauschenberg, parmi ceux qui ont réinventé le langage de l’art abstrait au lendemain de la Seconde Guerre mondiale.
Né à Città di Castello (Ombrie) en 1915, Alberto Burri montre un intérêt pour l’art et le dessin dès son plus jeune âge, admirant notamment les œuvres de Piero della Francesca dans sa région. Il étudie cependant la médecine avant de s’engager dans l’armée italienne. Il est capturé en 1943 en Tunisie, et est envoyé dans un camp de prisonniers de guerre au Texas. C’est là qu’il commence à peindre les paysages qui l’entourent. Il se consacre d’abord à la peinture figurative sur des supports en toile de jute, avant de se tourner vers d’autres formes d’expression. Dès 1948, sa peinture est déjà essentiellement abstraite et expérimentale : il commence à travailler avec des matériaux peu orthodoxes tel que le goudron, le Vinavil, le sable et la toile de jute. Utilisant le matériau brut comme objet d’art à part entière, il crée son premier Sacco, un assemblage de toile de jute déchirée, cousue et suturée, qui devient rapidement la série la plus célèbre de l’artiste.
Burri devient connu sous le nom « d’artiste des plaies », une étiquette à l’origine de la célèbre rétrospective de 2015 au musée du Guggenheim à New York : « Alberto Burri : The Trauma of Painting ». Au fil de son évolution, la production artistique de Burri se concentre de plus en plus sur une réflexion autour du matériau en lui-même, et de ses processus de transformation. Dissous par le feu, corrodés ou consommés par le temps, les matériaux de ses œuvres sont détruits par la même gestuelle artistique qui les transforme, et dont l’image résiduelle est perceptible dans l’œuvre elle-même. En travaillant de manière novatrice, oscillant entre chaos et contrôle dans sa pratique artistique, et en utilisant des matériaux pauvres et préfabriqués, Burri rompt avec la peinture traditionnelle de son temps.
Malgré le caractère indépendant de ses concepts et créations, Burri a des liens avec les courants artistiques majeurs de son temps, et influence de nombreux mouvements avant-gardes. Son travail s’inscrit également dans un dialogue artistique constant avec ses confrères italiens, particulièrement Lucio Fontana, alors qu’ils cherchent à transcender la surface tangible de la toile en la perforant. Leur réflexion répond alors à l’anxiété subjective et existentielle de la peinture d’après-guerre. En explorant une large gamme de procédés et de matériaux atypiques, Burri invente un nouveau genre de peinture-objet et influence directement les mouvements du Process Art et de l’Arte Povera. Ses œuvres créées à partir de matériaux réutilisés et recyclés tels que le plastique, le métal, le bois ou encore la toile de jute ont une forte incidence sur des artistes tels que Robert Rauschenberg et Cy Twombly, qui voient son travail à Rome.