C’est ma quatrième exposition avec Thomas Bernard. Elle s’intitule « Monuments offerts » et comme d’habitude, le titre en est un peu indépendant ou plutôt, il est comme une œuvre autonome. A ma grande surprise, personne ne m’a jamais questionné sur mes titres d’exposition alors que je travaille dur pour qu’ils soient étrangement conceptuels, subtilement et vraisemblablement anodins (parmi les précédents : Année Le Nôtre, 1998, Sculpture, Vasarely Go Home).
Je suis attiré et répugné par le spectaculaire. J’essaie d’en isoler des aspects et de les donner à voir.
L’identité est aussi un sujet mais je trouve plus utile de ne pas en parler.
Il y a du feu. Un élément portable, une maquette, un détail.
Il y a du marbre, épais de 2 cm et suffisamment petit pour qu’une personne puisse le porter.
Il y a tous les pays d’Europe, planant dans l’air, fermement tendus entre le plafond et le sol.
Ils sont présentés en noir et blanc. Ils sont supposés attirer (du moins certaines personnes).
Il y a un autre morceau de marbre. Il est encore plus petit, de la taille d’une carte postale.
Une tranche découpée du monde (comme une photographie ?), polie et installée avec un geste exagéré.
Du cuivre, de l’aluminium, pliés, revêtus d’une reliure en tissu.
Des informations (un peu).
Le feu provient d’Ed Ruscha.
Ou bien d’Yves Klein : je me souviens avoir vu son mur de feu sur la terrasse du toit du musée à Nice quand j’étais adolescent.
Ruscha une douzaine d’années plus tard, alors que j’étais à Los Angeles pour quelques mois. Son “Los Angeles County Museum on Fire” en tête, tout comme de nombreux autres feux dans ses photographies et peintures. C’est aussi à Los Angeles que mon support truss qui émet des flammes a été fabriqué 10 ans plus tard, par un sympathique motard pyromane très tatoué et avec un sérieux dévouement pour le détail.
Nous avons grillé des saucisses dessus la nuit précédent le vernissage et des guimauves le soir de mon anniversaire.
Lorsque les flammes ne sortent pas, cela me va aussi. La bouteille de gaz propane, bleue, verte ou argentée, est la promesse silencieuse d’une excitation archaïque.
J’aime les monuments dysfonctionnels, ceux qui sont éphémères.
Ne faites pas confiance à ceux qui sont offerts.
Andreas Fogarasi (né à Vienne en 1977) est préoccupé par la présentation et la représentation. A travers ses installations, sculptures, vidéos et photographies, il analyse comment des espaces, des villes, des idées politiques ou même des évènements historiques deviennent des images et questionnent le rôle de la culture – l’art, l’architecture et le design – dans ce processus de « culturalisation » de l’économie, moteur d’une compétition pour attirer les touristes, les investisseurs et l’attention des médias.
Formellement empreintes d’Art Minimal et d’Art Conceptuel, les œuvres d’Andreas Fogarasi sont autant des sculptures autonomes et documentaires. L’élément documentaire est consciemment séparé et demeure dans un équilibre précis entre information et transparence. L’aspect sculptural est fortement architectural, faisant souvent référence à des monuments emblématiques, des formes de présentations commerciales ou des formes temporaires d’architecture comme des stands de foires, des scènes ou des pavillons.
Andreas Fogarasi a remporté en 2007 le Lion d'Or du Meilleur Pavillon National pour le Pavillon Hongrois de la Biennale de Venise. Il participe à de nombreuses expositions internationales, parmi ses expositions personnelles : Museo Nacional Reina Sofia, Madrid ; Proyectos Monclova, Mexico City ; Georg Kargl Fine Arts, Vienne ; MAK Center, Los Angeles (avec Oscar Tuazon) ; GfZK – Museum of Contemporary Art, Leipzig ; Museum Haus Konstruktiv, Zürich ; Galeria Vermelho, Sao Paulo ; Prefix Institute of Contemporary Art, Toronto ; Ludwig Museum, Aachen ; Lombard Freid Projects, New York ; Trafo House of Contemporary Arts, Budapest ; Grazer Kunstverein, Graz.