La Galerie Templon, qui travaille avec Claude Viallat depuis 1973, propose de découvrir à Bruxelles un ensemble inédit d’œuvres récentes de l’artiste, Les échelles de Nîmes, qui mettent en valeur un aspect moins connu du travail du fondateur de Supports-Surfaces : les jeux sur le volume et de l’espace, loin de toute représentation conventionnelle de l’accrochage de la peinture.
Yves Michaud rappelle que Claude Viallat ‘peint souvent des surfaces qui sont en réalité des enveloppes d’espaces mises à plat ou encore développées’. Dans Les échelles de Nîmes, entre le positif et le négatif, les lanières de toile et le vide, la forme en osselet devenue la ‘signature’ si reconnaissable de Claude Viallat n’est plus uniformément peinte. L’artiste revisite le thème de l’échelle, un élément (peinture ou objet, en corde, toile ou gaze) qui travaille la mise en rapport du sol et du mur, largement exploité par le mouvement Supports/Surfaces et notamment par Daniel Dezeuze.
Le titre de la série renvoie aux Echelles de Venise réalisées par l’artiste en 1976, moment où le système pictural de Claude Viallat se complexifie : le tissu est morcelé par l’assemblage de tissu d’origines différentes, le support et ses coutures dictent la composition et la structuration de la toile.
Créées à Nîmes - où l’artiste est né en 1936 et où il vit et travaille aujourd’hui - les nouvelles oeuvres donnent à voir l’extraordinaire vitalité, la ‘boulimie’ créatrice de l’artiste au travail quotidiennement à son atelier. L’exposition fait une fois de plus la démonstration de l’incroyable capacité de Claude Viallat à se renouveler : à partir de la forme abstraite, toujours identique, qu’il répète depuis cinquante ans dans une démarche continue où le support est déterminant, chaque peinture est singulière.
Claude Viallat est à l’origine de la création de Supports-Surfaces, mouvement d’avant-garde artistique, à la fois théorique et politique constitué en 1970, regroupant entre autres Vincent Bioulès, Louis Cane, Daniel Dezeuze, Jean-Pierre Pincemin ou Noël Dolla, qui appela à un renouvellement de l’art par la remise en question des matériaux traditionnels comme la toile et le châssis. Il commence ainsi à travailler sur des bâches industrielles, libres de tous châssis, sur lesquelles il répète à l’infini une même forme abstraite. Répétée au pochoir, dans des couleurs variées et sur des supports divers (tissus d’ameublement, tapis, matériaux de récupération), ce motif annihile la notion de « sujet » et a permis à Claude Viallat de mener une réflexion sur le sens du geste créatif et le statut d’œuvre d’art.
Depuis cinquante ans, Claude Viallat compte parmi les figures majeures de l’art contemporain. Il a représenté la France à la Biennale de Venise en 1988. Son travail est aujourd’hui incontournable et son approche revêt une actualité toute particulière au vu du développement de la jeune scène américaine qui retravaille son héritage (pauvreté du matériau, répétition, exploitation de l’erreur, réflexion sur la surface) mais aussi de la revalorisation du vernaculaire et des pratiques artisanales dans la création contemporaine internationale. Son œuvre est présente dans de nombreuses collections publiques dont celles du Musée National d’Art Moderne de la Ville de Paris, du Mnam - Centre Pompidou, du Moma (New York). Le Musée Fabre à Montpellier lui a consacré une grande rétrospective à l’été 2014. Une grande installation de 1982 de Claude Viallat sera exposée cette année dans la section Unlimited de la foire de Art Basel Unlimited.