Thea Gvetadze est une artiste qui crée des images de scénarios énigmatiques, chargés de tension, d’émotion et de symbolisme. Elle expérimente des techniques traditionnelles avec des matériaux comme l’argile et le textile, entre autres. La pratique de Gvetadze spécule sur des formes de création d’images, de représentations et de narrations hautement idiosyncrasiques. Ses tableaux en particulier, le plus souvent peints sur du velours noir, sont des compositions vives et absconses qui résistent à la force d’attraction d’un tel fond noir et cosmique.
L’exposition individuelle de Gvetadze au M HKA comporte une sélection d’œuvres nouvelles ou récentes, dont des tableaux, des céramiques et des tapisseries. L’ensemble démontre la variété et la sophistication de sa création visuelle. Ces œuvres sont présentées aux côtés d’artefacts « ready-made » profondément chargés et personnels, qui portent les titres Esophagus Foreign Bodies et Trachea Foreign Bodies (tous deux de 2014) – la présentation personnelle de son père, Paata Gvetadze, d’objets de l’ère soviétique que des personnes ont accidentellement avalés et qu’il a retirés de leur gorge au cours de sa carrière de médecin.
Thea Gvetadze vit et travaille à Tbilissi, Géorgie. Après des études à l’Académie des Beaux-Arts de Tbilissi, elle a déménagé à Amsterdam en 1993 pour y poursuivre ses études à la Rietveld Academie et s’est ensuite inscrite à l’Académie des Arts de Düsseldorf. Elle a présenté des expositions individuelles à : Gallery Nectar, Tbilissi ; Museum von Ostwall, Dortmund et au Pavillon géorgien à la 50e Biennale de Venise en 2003. Gvetadze a également participé à des expositions et des projets à Art General, New York ; au Cobra Museum, Amstelveen et au Musée d’Histoire Karvasla, Tbilissi.
L’exposition de Thea Gvetadze est présentée dans le cadre du programme IN SITU au M HKA. IN SITU propose des expositions monographiques à échelle moyenne d’artistes importants du monde entier, en début ou en milieu de carrière. Le programme se concentre sur la commande de nouvelles œuvres et les pratiques expérimentales dans l’espace d’exposition le plus vaste et le plus atypique du M HKA. Le programme IN SITU est dirigé par Nav Haq, commissaire d’expositions au M HKA.
Cette série d’œuvres a été peinte à même le velours noir et s’inspire des visites annuelles de l’artiste en Géorgie, lorsqu’elle vivait encore en Allemagne, et plus spécifiquement de ses promenades et de ses rencontres avec diverses personnes – marchands sur les marchés, pêcheurs, jardiniers et autres habitants locaux – qui font partie du théâtre de la rue. Énigmatiques, recelant une certaine obscurité, ils reflètent des récits de vies individuelles, des gestes et des attitudes corporelles qui dévoilent un langage non verbal.
Esophagus Foreign Bodies et Trachea Foreign Bodies (tous deux de 2014) comportent les présentations personnelles ayant appartenu au père défunt de l’artiste, le Docteur Paata Gvetadze, et se composent d’objets que des personnes ont accidentellement avalés et qu’il a retirés de leur gorge au cours de sa carrière de médecin. Retirés lors d’interventions en urgence, on peut considérer que chaque objet représente une vie sauvée. Constituant une sorte de musée de babioles de l’ère soviétique, ces collections évoquent le voyage aller et retour à travers le corps humain d’objets « étrangers » inassimilables.
Zeda Tsinsvla est la première que l’artiste a réalisée après s’être remise d’une blessure grave il y a dix-huit mois. L’œuvre fait référence au cimetière de la région d’Ajara, en Géorgie, où sont enterrés des membres de la famille et où on l’emmenait quand elle était enfant. Dans l’ancien abribus en face de l’entrée du cimetière, une grande mosaïque datant des années 60 représente une scène de moisson abondante récoltée par de jeunes gens sous un ciel bleu. Cette représentation joyeuse et rassurante contraste nettement avec la mort et la tristesse du cimetière. L’œuvre de Gvetadze sélectionne des éléments particuliers de la mosaïque en se demandant pourquoi l’œuvre d’un artiste anonyme a été installée à cet endroit précis, où elle se trouve toujours d’ailleurs.
Après des études d’art à l’Académie de Tbilissi, Gvetadze a déménagé à Amsterdam en 1993 pour y poursuivre ses études à la Rietveld Academie. Sur le plan politique, cette période de transformation, après la dissolution de l’Union soviétique en 1991, était traumatisante pour la Géorgie. Pour l’artiste, la dislocation de forme visuelle du « réalisme socialiste » est comme une métaphore de l’effondrement des structures du pays. Avant d’acquérir quelque connaissance que ce soit des modes d’expression et des langages du monde de l’art contemporain, la jeune artiste a intuitivement suivi les rythmes du changement de réalité qui s’opérait autour d’elle, définissant une voie de transition dans son travail, qu’elle a tenté de visualiser dans ces compositions.