La Galerie Xippas de Genève est heureuse de présenter une exposition de l’artiste anglais Darren Almond. Explorateur fasciné par la question du temps et de sa représentation, Darren Almond développe depuis près de vingt ans une œuvre composite qui mêle aussi bien des photographies, des films, des peintures, et des sculptures. Il réunit pour sa deuxième exposition à Genève un ensemble de peintures inédites.
Darren Almond travaille des supports multiples au travers desquels il transmet et redéfinit ses propres notions de temps, d’espace, de durée et de mémoire collective, regroupant ainsi un corps d’œuvre d’une étonnante diversité formelle et d’une grand cohérence conceptuelle. Les deux nouvelles séries de peintures présentées dans son exposition proposent d’explorer précisement la notion d’écoulement du temps. Darren Almond s’appuye pour cela sur deux concepts qui donnent également à l’exposition son titre : The Swerve et The Light of Time. Deux concepts qui définissent notre rapport au temps et à l’espace et qui remettent en jeu les fondements de nos perceptions et de nos connaissances.
Le premier, The Swerve – en français Clinamen – découvert par le poète romain Lucrèce au Ier siècle av. J.-C, décrit un écart, une déviation spontanée de la trajectoire des atomes pendant leur chute dans le vide. Cette légère déviation des atomes hors de la trajectoire rectiligne qui est la leur, en vertu de leur poids et de la pesanteur, permettrait aux atomes de s’entrechoquer.
« Si nous comparons cette découverte au langage de la science actuelle, précise l’artiste, nous avons récemment découvert un semblant de cette déviation des atomes dans les ondes gravitationnelles. Nous avons été capables de mesurer avec certitude qu’il y a une ondulation incroyablement subtile dans la gravité même et que la gravité n’est pas une force constante comme on le pensait auparavant. Nous avons conclu qu’il doit y avoir au centre de notre propre galaxie non pas un, mais deux trous noirs. Ce sont ces deux masses sismiques et noires, situées au cœur de notre galaxie, qui oscillent sur elles-mêmes et qui génèrent ce déplacement dans l’attraction gravitationnelle et nous conduisent à la déviation des atomes – The Swerve – de Lucrèce. »
C’est précisement ce mouvement infime et fortuit, temporellement indéterminé et aléatoire, qui expliquerait la création du monde. Lucrèce se questionne à ce propos dans son poème De la nature des choses : « D’où vient cette liberté accordée sur terre à tout ce qui respire, d’où vient, dis-je, cette volonté arrachée aux destins, qui nous fait aller partout où le plaisir entraîne chacun de nous, et, comme les atomes, nous permet de changer de direction ? ». Le Clinamen – The Swerve – en serait donc la réponse : « cette légère déviation des atomes introduit l’indétermination dans l’univers de la nécessité. »
Le second concept représenté dans ces nouvelles peintures, The Light of Time – littéralement en français la Lumière du Temps – s’appuye lui sur une unité de mesure. Le temps-lumière est un moyen de comprendre notre perception du monde, notre temporalité : elle permet de quantifier notre existence grâce à la lumière. « Ainsi en un instant, explique Darren Almond, il y a une ligne directe et explicite de la lumière visible, puis il y a le moment où cette ligne a été brisée, secouée et déplacée, déviée dans un souvenir d’un instant passé ».
Chacune des peintures ouvre vers une temporalité singulière et rend compte de notre perception du monde et de l’espace temps, de ce que cela signifie d’exister dans les lieux réels et fictifs de la temporalité. Elles dessinent toutes des moments, des mouvements dans lesquels différentes échelles de temps entrent en résonance.
Darren Almond est né en 1971 à Wigan, en Angleterre. Il vit et travaille à Londres. Il a été nommé pour le prix Turner en 2005 et était finaliste du prix Pictet en 2009. Son travail a fait l’objet de nombreuses expositions personnelles : à la Villa Pignatelli-Casa della Fotografia, Naples (2018) ; au MUDAM, Luxembourg (2017) ; au New Art Center à Salisbury en Angleterre (2016) ; à la Art Tower Mito au Japon (2013-14) ; au Frac de Haute-Normandie et au Frac d’Auvergne (2011) ; à la Parasol Unit à Londres (2008), au musée Site à Santa Fe (2007) ; au musée Folkwang à Essen (2006) ; au K21 à Düsseldorf (2005) ; à la Fondation Nicola Trussardi à Milan (2003) ; à la Tate Britain à Londres, à la Kunsthalle de Zürich et à la Fondation De Appel à Amsterdam (2001) ; à la Renaissance Society à Chicago (1999), entre autre. Il a également participé à de nombreuses expositions collectives notamment à la Kunst Haus de Vienne, Autriche (2018) ; au Cornell Fine Arts Museum à Witer Park, USA, et au ARoS Museum of Modern Art, Danemark (2017) ; au Musée d’Art Contemporain de Rome, au Centre Pompidou de Metz et au MET New-York (2016) ; au Museum of Fine Arts de Montréal et au Kunstmuseum de Stuttgart en Allemagne (2014) ; au National Art Center de Tokyo (2013) ; au musée d’Israël à Jérusalem (2012) ; au Musée national d’art de Monte-Carlo à Monaco et au musée d’art contemporain de Miami (2011) ; au MAC/VAL à Vitry-sur-Seine (2010) ; à l’ICA à Philadelphie et au musée d’art cycladique à Athènes (2007) ; au MCA à Chicago (2005) ; à la Collection Jumex à Mexico City, à la Fondation Beyeler à Bâle et à la Biennale de Venise (2003) ; et enfin à « Sensation » (1997-1999), qui regroupait les « Young British Artists » de la collection Saatchi à la Royal Academy of Arts à Londres.