Backslash est très heureuse d'annoncer la nouvelle exposition de l'artiste français Rero dont les recherches se sont enrichies ces dernières années à travers ses résidences aux Etats-Unis et en Amérique du Sud. Trois ans après sa dernière exposition à la galerie, il choisit de nommer sa nouvelle proposition IBID., abréviation du latin ibidem pour « même endroit », afin d’exprimer sa volonté de retourner dans un espace réel déjà investi. Cependant, au lieu de rayer ce mot d’un trait épais, comme à son accoutumée, il décide de le raturer par l’aphorisme ÉPUISEMENT DES IDÉAUX et questionne ainsi les archétypes de perfection que notre esprit peut concevoir indépendamment de la réalité. Pour Rero, cette nouvelle exposition met en exergue notre volonté et/ou notre nécessité d’entamer une phase de transition dans une attitude plus pragmatique, en empruntant différentes voies alternatives qui pourraient nous rapprocher de nos idéaux tout en évitant l’affaiblissement.
L'exposition présente un résumé de l'ensemble des recherches de Rero de ces dernières années à travers le continent américain, notamment à Rio de Janeiro, dans la Candelaria de Bogota, mais aussi en Californie. Chacun des ensembles d'œuvres questionne l'un de nos idéaux, qu'il soit culturel, déterministe, politique, social, financier, virtuel, mais aussi tout simplement humain ; ce que l’on souhaiterait idéalement suivre, à l’image de Kallipolis, la cité idéale que décrivait Platon dans La République.
Notre idéal virtuel et notre rapport au numérique sont définis par une installation immersive, au rez-de-chaussée, sur le thème de F.O.M.O. (acronyme de Fear Of Missing Out). La peur de manquer quelque chose est une sorte d'anxiété sociale, celle de manquer une nouvelle importante ou un autre événement quelconque donnant une occasion d'interagir socialement et affectant particulièrement la concentration des jeunes mais qui pertube également les différentes générations.
Notre idéal sociétal s'inspire du film Fahrenheit 451 de François Truffaut, tiré de la nouvelle de Ray Bradbury, et propose une série de livres brûlés enfermés sous résine abordant le thème de la censure et l’autocensure, référence au code d'erreur 451 d'une page web inaccessible pour des raisons d'ordre légale. Le nombre 451 est la température en degrés Fahrenheit à laquelle le papier s'enflamme sans besoin d'une flamme extérieure.
Notre idéal financier est remis en question par l'intervention de Rero sur des billets de monnaie locale, notamment la livre de Brixton, à l'effigie de David Bowie, déjà en circulation à Londres, soulignant ainsi les choix alternatifs envisageables dans nos échanges financiers.
Notre idéal politique est présenté par une installation de cerfs-volants fabriqués à Rio de Janeiro, engins utilisés dans les favelas afin de prévenir de l'arrivée des forces de l'ordre mais aussi moyen pour les membres d'une communauté de régler leurs différents en s'affrontant par ces « armes ».
Notre idéal déterministe est défini par une série de toiles dont les expressions suivent le précepte de double contrainte (double bind) défini par Paul Watzlawick, membre fondateur de l'Ecole de Palo Alto, qui proposait comme exemple pour illustrer ce concept un panneau autoroutier indiquant « ignorez ce panneau ». Rero tente ici d'activer les propres ressources de tout un chacun à digérer et à se démarquer de ce qui nous est imposé.
Avec cette série d'œuvres et toujours avec humour, Rero attire notre attention sur le changement de société imminent dont nous pourrions prendre les commandes, notamment par des voies alternatives, thème principal de l'exposition. Il veut mettre en évidence les limites de notre système vieillissant qui ne sclérose pas seulement notre réalité mais également nos idéaux.
Une monographie, de 230 p., en édition limitée et signée de 150 ex., regroupant les recherches de Rero sur les dix dernières années, est publiée à l'occasion de l'exposition.
Le travail de Rero a été exposé dans de nombreuses institutions, notamment au Centre Pompidou, au Grand Palais à Paris, au MAC/VAL, au MAC de Bogota ou à la Caixa Cultural de Rio de Janeiro, Sao Paulo et Brasilia.