Le mot partition désigne quelque chose qui divise, sépare. En français, ce mot peut également faire référence à un morceau de musique, à une partition musicale.
Je pense cette exposition comme une exposition de cartes postales ou comme une exposition qui serait une carte postale, c’est-à-dire qui aurait deux côtés, avec sur l’un une image, sur l’autre du texte, à la fois réunis et maintenus séparés par un mur de carton fin. J’envisage les oeuvres de cette exposition comme des cartes postales, des traces, des miettes, laissées derrière moi lors de mes déplacements.
Plutôt que d’écrire sur ces oeuvres avant de les montrer, je préfère leur écrire une fois qu’elles seront accrochées. Je dis bien leur écrire, comme on écrirait à quelqu’un qui se serait embarqué dans un voyage périlleux, et avec qui l’on ne pourra communiquer qu’une fois rentré. Les oeuvres ne communiquent rien, elles s’impriment dans le flux de communication qui les entoure, comme une pagaie plongée et maintenue sous l’eau. Si ça vous interpelle, je m’arrêterai, mais j’espère que vous me préviendrez quand vous serez fatigués. Parfois j’aimerais juste écrire la boucle d’un circuit.
« Si vous éprouvez un sentiment de sympathie, l’aspect de l’humanité sera alors plus fidèle à ses profondeurs que ses mots ; et même dans mon propre pays, les choses qui m’ont le moins trompé sont celles que j’ai apprises en tant que Spectateur. » Ils s’assirent côte à côte comme des perles. Julien Bismuth
En 2012, lors d’une résidence au Brésil, Julien Bismuth s’intéresse à la langue singulière de la tribu Pirahã, qui habite au bord de la rivière Maici. Leur langue est tonale, comme le Chinois ou certains dialectes africains ; elle peut être sifflée, fredonnée, ou traduite en musique, ses mots et vocables ont chacun leur propre mélodie, ce qui permet aux Pirahã de siffler des phrases entières, et ainsi communiquer à distance dans la jungle. En Septembre, il accompagne le chercheur M. Gonçalves sur le terrain ; c’est en articulant une partie du matériel récolté sur place avec des projets déjà en cours que va naître le projet « Partition ».
L’oeuvre de Bismuth s’est toujours située entre Littérature et Arts Plastiques, les écritures cryptées et la caricature se révélant fondamentales dans sa pratique, ainsi qu’un rapport à «l’objet scénique» sur lequel l’influence de Guy de Cointet fut déterminante. Menant à la fois un travail de recherche théorique et une oeuvre plastique, il fait dialoguer dessins, sculptures, installations, écriture et performances. Depuis une dizaine d’années, son travail s’est recentré sur les codes du langage, tant textuels que corporels, ses pièces récentes pouvant être décrites comme des mises en scène d’éléments linguistiques et plastiques, et souvent musicaux.
Né en 1973 à Paris, Julien Bismuth vit et travaille entre New York et Paris. De 1991 à 1997, il étudie l’Histoire de l’art, les Nouveaux Médias et la Performance à UCLA (Bachelor of Fine Arts) et au Goldsmiths College of Art (Master of Art) aux côtés de prestigieux professeurs tels Paul Mc Carthy, Liam Gillick ou encore Richard Jackson. Il termine actuellement sa thèse en Littérature Comparée à l’Université de Princeton. Son travail a été montré dans de nombreuses institutions françaises et étrangères telles que le Orange County Museum de Los Angeles (2008), la Tate Modern de Londres (2009), le GAK de Brême (2011), le Royal College of Art de Londres (2011), le Frac Ile-de-France (2012), la Kunsthalle de Vienne (2012), le Jeu de Paume (2008 et 2013) et le Palais de Tokyo (2014 et 2015) ou encore le Guggenheim Museum de New York en 2016. Il est également représenté par les galeries Emanuel Layr (Vienne), Simone Subal (New York), The Box (Los Angeles) et Parisa Kind (Francfort).