La MB&F M.A.D.Gallery a le plaisir d’accueillir l’exposition intitulée « X-RAY », composée de photographies réalisées aux rayons X par l’artiste visuel britannique Nick Veasey.
Alors que le monde actuel est obsédé par l’image, la superficialité et l’artifice, Nick Veasey va à l’encontre de ces distractions sans substance en plongeant au cœur des choses, afin de nous dévoiler de quoi elles sont réellement faites. Au lieu de créer ou de transformer des objets, Nick Veasey expose des choses qui existent depuis toujours, des objets que l’on croit connaître mais que l’on ne connaît pas vraiment, du moins pas sous cette forme là.
Nick Veasey réalise des clichés à l’aide d’un matériel d’imagerie radiographique et donne ainsi une toute autre dimension aux rayons X en révélant, dans les moindres détails, les différentes strates et composants de nos objets du quotidien. Ces objets, naturels ou façonnés par l’homme, passent alors du statut d’objet ordinaire à celui d’objet fascinant.
L’artiste utilise les rayons X, aux radiations potentiellement mortelles, pour nous entraîner dans un monde d’habitude invisible et caché. Le résultat est une série d’œuvres empreintes de poésie et de grâce. Les rayons révèlent l’intérieur des matières solides qui nous apparaissent alors aériennes et douces, donnant au spectateur le sentiment inestimable de voir la réalité avec un œil nouveau, dans une perspective qu’il n’avait jamais expérimentée auparavant.
Les œuvres de Nick Veasey sont un exemple parfait de la fusion entre l’art et la science. Échappant à toute classification dans le domaine de la photographie, elles possèdent néanmoins une aura qui pousse des espaces comme la M.A.D.Gallery, ou même des institutions scientifiques, à les exposer.
La M.A.D.Gallery expose ainsi 8 créations de Nick Veasey : Matchless Rider, Mitchell Film Camera, Decks, Airport X-ray, Typewriter, VW Beetle, Superman and Clark Kent et Lightbulb. Toutes ces œuvres sont disponibles en tirages classiques ou sous encadrement Diasec. Superman and Clark Kent est également disponible en version lenticulaire. Ce procédé animé dévoile la transformation de Clark Kent en son alter ego aux super-pouvoirs, et vice versa.
Explications détaillées de la technique d’imagerie aux rayons X utilisée par Nick Veasey
Nick Veasey et sa petite équipe travaillent dans son Radar Studio, un ancien poste d’espionnage datant de la Guerre froide, acheté à l’armée et reconverti en studio photo. Il est situé au milieu d’un champ, dans la campagne du Sud de l’Angleterre, dans le Kent. L’isolement du lieu était crucial du fait de l’émission de radiations potentiellement mortelles, et de la durée d’exposition aux rayons X utilisés par Nick Veasey. « C’est une question de santé, on est rarement content d’avoir une machine à rayons X près de chez soi », explique-t-il.
Pour créer ses images, Nick utilise une pellicule très peu sensible, ce qui donne des images sans grain et d’une grande netteté. Son matériel de radiographie aux rayons X est différent de ceux que l’on peut trouver dans les hôpitaux. En effet, alors qu’un appareil de radiographie classique, en milieu hospitalier, émet des rayons durant 0,2 seconde, pour une puissance de 100 000 volts, la machine de Nick, très difficile à se procurer, est bien plus puissante. Elle peut aller jusqu’à 200 000 volts et émettre des rayons X sur une durée bien plus longue, parfois jusqu’à 20 minutes.
Rien d’étonnant alors, vu l’exposition potentielle à de tels niveaux de radiation, à ce que Nick prenne un maximum de précautions. Les murs de son studio ont été recouverts de blocs de 10 cm d’épaisseur d’un matériau appelé lignacite, qui empêche les rayons X de passer. Le sol est en béton haute densité, pour absorber les radiations, et la porte en plomb et acier, qui permet d’accéder à la zone de radiation, pèse 1 250 kg. « Dans toute ma carrière, j’ai été exposé deux fois aux radiations », raconte Nick Veasey. « C’est deux fois de trop, car cela reste en vous à vie. Cela a un effet cumulatif. »
Les niveaux élevés de radiation impliquent également que lorsqu’il fait une photo nécessitant un être humain ou un animal, Nick doit utiliser soit un squelette, soit le corps d’une personne récemment décédée. « Les gens font don de leur corps à la science ou à l’art. Et quand c’est le cas, je suis sur la liste d’attente », explique-t-il.
Chaque image est prise à taille réelle et fixée sur des segments de films de 35 par 43 cm. Une dimension tout à fait suffisante si l’on veut passer une ampoule aux rayons X, mais pour un objet plus grand, comme une voiture, cela signifie que Nick doit démonter entièrement le véhicule et radiographier un par un chacun de ses composants. Cela représente des mois et des mois de travail.
« Techniquement, il est possible de passer une voiture en une seule fois aux rayons X », explique l’artiste, « mais le résultat serait une image confuse. Je décompose tout, je passe chaque pièce aux rayons X, je fais des clichés de chacune aussi beaux que possible et puis je réassemble le tout. »
Nick Veasey transforme ensuite les radiographies obtenues en fichiers numériques à l’aide d’un scanner à tambour des années 1980, « un vrai monstre », qui crée des images « vraiment fantastiques, à haute résolution », avec un rendu bien plus détaillé que n’importe quel autre scanner qu’il a pu essayer par le passé. Les images sont ensuite importées sur ordinateur et patiemment assemblées numériquement. Les traces visibles du chevauchement des différentes parties sont également effacées.
Nick affirme que ce n’est pas seulement le résultat final qui lui procure de la satisfaction, c’est aussi tout le cheminement nécessaire pour y arriver.
« Ce qui est super avec les rayons X, c’est que même quand on croit les connaître, ils réussissent toujours à vous surprendre », explique-t-il. Puis il admet : « Je me trompe souvent. On fait tous des erreurs. Et on apprend de ses erreurs. On peut surexposer les images, ou les sous-exposer, parfois cela manque de constrastes. C’est comme en photographie classique, mais comme la radiographie est une image en transparence, il n’y a pas vraiment besoin de se soucier de la mise au point, ni de la lumière. Les rayons X ont un spectre lumineux à part entière qui n’est simplement pas visible à l’œil humain. »
« Du coup, j’expérimente, encore et encore. J’essaie des expositions, des distances et des films différents, comme n’importe quel photographe. Un photographe classique utiliserait différents objectifs, différents supports ou différents réglages de sensibilité ISO. J’expérimente, comme tout le monde. J’essaie d’obtenir la meilleure photo possible », conclut le photographe.
Nick Veasey
Né à Londres en 1962, l’artiste photographe britannique Nick Veasey s’est intéressé à la photographie dès son adolescence, avant de devenir photographe professionnel vers la trentaine. Il a travaillé dans la publicité et dans le milieu du design durant les 10 années qui ont suivi, en axant son travail sur des clichés photographiques conventionnels. C’est durant cette période qu’il a utilisé pour la première fois les rayons X en tant que technique photographique. On lui avait demandé de radiographier une cannette de soda pour une émission de télévision. Nick en a profité pour passer les chaussures qu’il portait ce jour-là aux rayons X. Le retour positif qu’il a reçu après avoir montré le résultat à un directeur artistique l’a encouragé à continuer dans cette voie. Il a donc décidé d’explorer plus en profondeur la photographie aux rayons X.
Depuis lors, Nick travaille essentiellement sur des images obtenues par rayons X. Ses œuvres éthérées et captivantes ont orné les galeries artistiques du monde entier et ont été utilisées dans des campagnes publicitaires internationales, ainsi que sur des emballages de produits. Il a également remporté plusieurs prix de photographie et de design pour son travail.
Au fil des années, Nick a réalisé un grand nombre de photographies obtenues par rayons X, des petits objets du quotidien, comme un ours en peluche, un de glace ou des fleurs, à d’énormes structures composées de multiples éléments, comme des voitures, un bus rempli de passagers et même un Boeing 777 à taille réelle dans le hangar l’abritant.
« Je cherche à susciter l’enthousiasme chez les gens et à leur permettre d’apprécier les objets qui les entourent d’une façon différente », explique l’artiste. « La technique des rayons X est très authentique, elle montre les choses telles qu’elles sont vraiment. Dans un monde aussi superficiel que le nôtre, c’est une vraie bouffée d’air frais. Elle montre de quoi est fait un produit ou un être vivant, comment il est construit, l’ingéniosité qui se cache derrière sa structure, et toutes ses imperfections. »