Almine Rech a le plaisir de présenter Quasi nocturne, la cinquième exposition personnelle de John M Armleder à la galerie, du 24 septembre au 23 novembre 2024.

Quasi nocturne, la cinquième exposition de John M. Armleder chez Almine Rech, présente un nouvel ensemble de « Pour paintings » (peintures coulées) accompagné d'une « Furniture sculpture », une « Puddle painting » (peinture flaque) et une mosaïque de verre. Invitant les rapprochements (et la réflexion) qui transcendent la matérialité, le style et les modes de production, l'exposition est une continuation de la recherche de l'artiste à brouiller les catégories (qu'est-ce qui fait d'une œuvre une peinture plutôt qu'une sculpture ?) et les distinctions (quelle différence fait-on entre les beaux-arts et la décoration ?).

Au cœur de l'exposition se trouve une douzaine de « Pour paintings » récentes de taille moyenne. Présentant une fluidité et des coulures colorées qui se chevauchent et se mélangent directement sur la toile, ces peintures illustrent comment Armleder s’intéresse à remettre en question l'intention de l'auteur par des actes de sérendipité. Évitant le pinceau (cette extension de la « main de l'artiste »), il encourage plutôt les matériaux liquides et visqueux à faire à leur guise sur la surface de la toile – goutter, éclabousser, se mélanger, repousser, se figer, absorber, etc. Si le procédé rappelle la technique « soak-stain » d'Helen Frankenthaler, l'approche d'Armleder est délibérément moins contrôlée. Des coulées plus épaisses donnent des compositions plus dynamiques caractérisées par des couleurs qui jurent et des textures rugueuses et irrégulières. Contrairement aux tâches de Frankenthaler, la peinture opaque d'Armleder (à laquelle il mêle souvent d'autres matières, comme des paillettes) s'accumule pour former des sortes de strates. Au lieu de créer une illusion de paysage (ou une allusion à celui-ci), les « Pour paintings » sont elles-mêmes topographiques et haptiques, chacune un environnement microcosmique qui demande à être visuellement parcouru et exploré. Capri, 2008, une « Puddle painting » dont la surface est incrustée de coquillages, d'étoiles de mer et de sable, évoque un lien entre l'abstraction et le paysage côtier qui environne la galerie.

Changeant le cadre de référence, du paysage à la décoration d'intérieur, Photomap (furniture sculpture), 2019, présente deux abstractions géométriques étroitement contrôlées suspendues au-dessus d'un placard Barber Osgerby avec miroir. Si les compositions minimalistes, qui présentent des carrés argent à chaque coin de la toile autrement vierge et des meubles impeccablement modernes, semblent s'allier à perfection au décor de la galerie cube blanc illuminé par une verrière, cette « Furniture sculpture » offre aussi un contraste esthétique flagrant face aux couleurs et à la liberté qui émanent des peintures « Puddle » et « Pour ». Cependant, le reflet de ces peintures dans les surfaces immaculées des miroirs de Photomap (furniture sculpture) fait qu'il est impossible de bien différencier ces œuvres dans le contexte de l'exposition. Soulignant les liens au sein du travail de l'artiste, Quasi nocturne invite le spectateur à prendre diverses perspectives afin de percevoir plus de similarités que de différences. À travers l'ensemble de l'exposition, des reflets et des réflexions, ainsi que des filtres colorés – comme avec la mosaïque de verre transparente, Dense clouds, 2024 – démontrent qu'il y a de multiples points de vue et manières d'aborder les œuvres exposées, aussi bien individuellement que globalement.

(Texte par Mara Hoberman)