Mes enfants avaient un jeu vidéo appelé Mario Kart, où si tu pouvais survivre à un niveau tu accédais à un autre, encore plus absurde et difficile, avec des obstacles de plus en plus fous, jusqu’à atteindre Rainbow Road, où les routes n’étaient plus que rubans de couleur dans l’espace infini, sans glissières de sécurité ni pauses, et où la seule compétence requise était la capacité à laisser aller.
(Joe Andoe, 2017)
La galerie est heureuse de présenter sa première exposition de l’artiste américain basé à New York, Joe Andoe (1955, USA).
La pratique de Joe Andoe est composée de peinture, dessin, vidéo et écriture.
Sa peinture figurative est presque exclusivement monochrome. La texture très spécifique laisse apparaître sous l’huile une épaisse couche de gesso, ainsi que les gestes du recouvrement préparatoire, et enfin la peinture à l’huile en couche délicate, pour un effet légèrement évanescent, étrangement suranné et hors du temps. On peut en dire autant de ses sujets : fleurs, paysages, vaches et veaux, animaux sauvages et totémiques (chevaux, loups, ours), ou bords de route. Il aime se définir comme un peintre de paysages. Joe Andoe a grandi à la campagne à Tulsa, et on sent cet héritage dans son travail : « Une fois, des chevaux me sont apparus. Je ne connais rien aux chevaux, sauf qu'ils sont toujours là, à l’est de Tulsa. Donc, lorsque j'ai peint le premier dans mon studio de New York, ça a résonné en moi, comme s’il était le symbole de ce qui me différenciait des 8 millions de personnes autour. »
Plus tard à New York, il a aussi commencé à peindre des sujets féminins, en commençant par son premier amour jusqu’à une série plus récente appelée Power Cosmic, où une déclinaison de jeunes femmes aux formes généreuses, aux poses rêveuses et au « tie and dye » récurrent, nous replace le contexte. Excepté ce détail capillaire, tout dans ses peintures est intemporel et dégage une force troublante. Andoe ne nous parle pas des gesticulations contemporaines ni de la globalisation, il communique à un niveau plus profond de l’être, où même l’esprit le plus rationnel se voit en contact direct avec la vibration mystique de ses compositions.
Joe Andoe a vécu pendant 10 ans au Chelsea Hotel (où trône une de ses grandes têtes de cheval), et raconte cela dans son livre « Jubilee City », entre autres histoires et réflexions autobiographiques. Il dessine aussi beaucoup dans des petits carnets, et intègre ses dessins à ses vidéos, avec des séquences de « found footage » et du texte lu, qui font de ses films des compositions multimédias.
Le titre de l’exposition « Rainbow Road » fait écho aux fonds multicolores qu’il utilise parfois comme variante aux monochromes noirs, mais ce choix est surtout ironique de la part de Joe Andoe, comme une promesse absurde en opposition à la mélancolie des scènes « banales » de ses bords de route et de ses paysages.
Le travail de Joe Andoe est présent dans de nombreuses institutions telles que le Museum of Modern Art (MOMA, NY), le Metropolitan Museum of Art, le Whitney Museum of American Art, le Fisher Landau Center, le Los Angeles County Museum of Art, le Dallas Museum of Art, entre autres.