Parallèlement à la rétrospective de l’œuvre photographique d’Anne et Patrick Poirier à la Maison européenne de la photographie, la Galerie Mitterrand est heureuse de présenter la troisième exposition personnelle du duo, dédiée à leurs maquettes qui occupent une place centrale dans leur œuvre.
Depuis la fin des années 60 et leur séjour à la Villa Médicis à Rome, Anne et Patrick Poirier s’intéressent aux sciences humaines, histoire, psychologie, anthropologie, et à l’architecture et l’archéologie. Ils utilisent des médiums très divers pour exprimer, sous formes métaphoriques, l'idée dominante de leur travail : la fragilité des êtres, de la nature et de la culture. L'usage récurrent de la maquette, qui représente toujours une architecture fictive, nourrie des réminiscences de leurs errances, de leurs relevés, empreintes… dans les sites archéologiques, en est un et non des moindres. En 1973, Ostia Antica, une maquette de douze mètres par six mètres en terre cuite, matérialise plus d’un an de leurs recherches sur le site antique éponyme, situé dans les environs de Rome. Avec le cycle Domus Aurea (1974-1982) -un ensemble de six maquettes noires en charbon de bois et fusain dont Ausée (1974-76), aujourd’hui au Musée Ludwig de Cologne-, ils passent de la lumière douce d’Ostia Antica à l’univers nocturne d’un sombre rêve inspiré par leurs fouilles d’architectes-archéologues comme ils se dénomment sur le site de l’ancien palais construit par Néron. Là encore, Anne et Patrick Poirier miniaturisent des ruines antiques pour rendre compte du danger qui pèse sur les cultures et la nature, sans cesse menacées par la violence des hommes et de l’histoire.
Si les maquettes noires des années 70 sont ancrées dans le passé, l’antiquité, les ruines, la mémoire et le chaos, celles des années 90, d’une blancheur immaculée, tentent de représenter sous forme de musées ou de bibliothèques utopiques, l’organisation du savoir, de la psyché humaine et de la mémoire. Avant même de connaître l'œuvre d'Aby Warburg, ils donnent à ces architectures la forme de l'ellipse, figure géométriquement parfaite qui symbolise pour eux la forme du cerveau. Deux d’entre elles du nom de Mnémosyne (1990-92), aussi monumentales qu’envoutantes, sont emblématiques de cette évolution esthétique d’Anne et Patrick Poirier, qui trouve une de ses sources dans le site solaire de la Villa Adriana et traduit symboliquement le passage de l’ombre à la lumière. Certaines de ces maquettes ovales et blanches, telle Ouranopolis (1995), relèvent du domaine de l’anticipation.
A l’occasion de l’exposition De Memoria Et Reminiscentia, Anne et Patrick Poirier présentent, au sein de l’espace historique de la galerie de la rue du Temple, un ensemble d’une dizaine de maquettes accompagné de dessins préparatoires et de photographies retraçant l’évolution de cette forme dans leur œuvre des années 70 aux années 90.
Anne et Patrick Poirier ont étudié à L’Ecole nationale des Arts décoratifs de Paris et séjourné comme pensionnaires de la Villa Médicis à Rome de 1967 à 1971. Ils ont participé à de nombreuses expositions internationales telles que la Biennale de Venise (1976, 1980 et 1984), la documenta VI à Kassel (1977) et la Biennale de Lyon en 2000. Leur travail a fait l'objet d'expositions dans les institutions les plus prestigieuses, telles que la Neuer Berliner Kunstverein à Berlin (1977), le Centre Georges Pompidou à Paris (1978), le MoMA à New York (1978) et The Getty Research Institute à Los Angeles (1999). Plus récemment, leur travail a été présenté au Couvent de la Tourette (2013) et au Musée des Beaux-Arts de Nantes (2014), au Musée Cocteau à Menton (2015), à la Triennale d'Echigo Tsumari Art Field au Japon (2015), au Musée d'art moderne et contemporain de Saint-Etienne (2016) et au Skulpturenpark Waldfrieden-Tony Cragg Foundation à Wuppertal (2016).
A l’occasion de l’exposition rétrospective des photographies d’Anne et Patrick Poirier à la Maison européenne de la photographie, les éditions Flammarion publient une monographie dédiée à l’ensemble de leur œuvre.