La galerie Vincenz Sala a le plaisir d’annoncer la première exposition personnelle de Pierre Sportolaro, qui se tiendra du 30 mai au 20 juin.
L’exposition, constituée d’un ensemble de dessins, d’objets et d’une vidéo permet de découvrir le processus de travail d’un artiste multiple à la recherche d’un langage visuel immédiat et intuitif.
Le travail de Pierre Sportolaro pose obsessionnellement, et à travers des séries toujours en cours, des questions sur le temps, le voyage et les métamorphoses. Des thèmes qui par amalgame, récurrence et recoupement permanent élaborent notamment une quête identitaire que révèle l’intitulé de l’exposition : ça pourrait être moi.
Une identité qui se perd dans le temps et dans l’espace social, qui se déplace, qui s’efface dans le souvenir pour renaitre sous d’autres traits. D’où cette dimension de la trace présente dans cette série de travaux.
Réalisés avec une économie de moyens, ils ont valeur d’indices qui dessinent une sorte de portrait dispersé de l’artiste dont est absente toute affirmation de soi voire une affirmation fragile, fragmentée, tourmentée lorsqu’elle tente de se cristalliser. Une conception de l’identité proche de la formule rimbaldienne « Je est un autre ».
L’exposition utilise l’espace de la galerie comme un volume ou un corps bicéphale dans lequel s’exprimeraient deux manifestations du moi : Désexister / Réexister.
Au rez de chaussée, un premier ensemble de dessins dont l’impact visuel provient de leur dimension plastique aléatoire, de ce lâchez-prise voulu par l’artiste, dans un mouvement qu’il désigne lui-même par le désir expérimental de « désexister ».
Ici les dessins sont exécutés au cours de voyages en avion, sous l’effet des mouvements de l’appareil. Sur la surface du papier, Pierre Sportolaro laisse surgir des tracés imprévus, sortes d’empreintes des sensations qui traversent à la fois le corps et le mental plongés dans un état d’absence au monde. Un corps minimal, un corps « potence » qui laisse vivre le bras comme un balancier qui relèverait les plus infimes mouvements de l’avion.
A l’étage, dessins, objets et vidéo réaffirment la volonté de « présence » de l’individu qui tente de « réexister ».
La série de dessins « les histoires » constitue une traversée et un voyage dans la mémoire, dans ses replis ; la production sans chronologie d’histoires sans narration, sans cause et sans finalité. D’un geste rapide et immédiat, Pierre Sportolaro fait surgir des esquisses de paysages, des topographies incertaines , des signes, des tracés de promenades et des formes entremêlées de mots, fragiles traces mnésiques qui restituent une réalité à des fragments du passé.
Sur des objets divers, poudriers, blush… qui renvoient au narcissisme présent dans la société, Pierre Sportolaro appose un tampon sur lequel est inscrit « ça pourrait être moi ». Un geste critique dans lequel le tampon sur le miroir brouille l’identité au lieu de la définir et de la catégoriser. Le tampon perd le rôle qui est le sien dans la société administrée au profit du « droit de se dire plongé dans le trouble identitaire » selon les mots de l’artiste.
Dans le miroir qui invite aussi au maquillage, à la métamorphose, le spectateur capte le reflet de son visage, ainsi invité à méditer sa propre identité par le biais de cette altérité proposée par Pierre Sportolaro.
A travers l’assemblage d’objets, il interroge la mémoire du passé, un passé perdu qui ne peut ressusciter dans le souvenir. Contenant au cœur des fruits sucrés les fragments dérisoires d’objets impropres à la consommation comme des clous ou une tête de Barbie, des pots de confiture se présentent telles des reliques d’un monde réifié et « désenchanté ».
Le jeu avec le trouble identitaire est également présent dans une vidéo où Pierre Sportolaro, dans son désir de ne pas se laisser enfermer dans son image et la répétition de gestes quotidiens codés, s’adresse à lui-même comme à un autre devant son miroir. Exercice quotidien sensuel et absurde.
Face à ces vanités sucrées, autres poudriers et différents dessins proposés, le spectateur est invité à s’interroger sur les objets qu’il garde ou consomme, les visages qu’il se façonne, les chemins qu’il emprunte dans le réel, sa mémoire ou ses fantasmes.